Extrait du journal

Nous n’avons rien à objecter à la reconnaissance du Riff par la Société des Nations. 11 a toujours été entendu que nous ne faisons pas une guerre de conquête et que nous n’entendons pas toucher à l’indépendance des Riffains. Abd el Krim sur ce point peut être fort tranquille et, s’il affecte de ne pas l’être, c’est de toute évidence pour obéir à ses conseillers ordinaires, désireux de présenter le Riff comme l’objet de nos convoitises impérialistes. Cette propagande-là, renforcée par les criailleries des communistes, ne devait pas, dans l’esprit de ceux qui la mènent, laisser le monde musulman indifférent En fait, elle n’a eu, jusqu’à présent du moins, d’effet qu’au Maroc où le mouvement de dissidence a été tel un moment qu’il a donné de vives inquiétudes à la résidence d’abord, au gouvernement en-, suite. Le mouvement semble aujourd'hui enrayé. quant au monde musulman, on ne voit pas que l’aventure riffaine l’ait autrement troublé et agité. Nous ne savons certes pas ce qu’il pense, car rien n’est difficile à sonder comme une conscience d’Oriental, mais il se tient coi et cela doit nous suffire. Mais serait-il aussi paisible demain, si Abd el Krim obtenait Larache et le reste ? On en peut douter. Après la défaite, rien n’est plus contagieux que le succès. Or, on aurait beau colorer des plus beaux prétextes politiques et nuancer l’abandon au faux sultan d’un certain nombre de villes, le proche et le lointain Orient ne voudraient retenir que le fait brutal : « Abd el Krim a vaincu », diraient-ils, puisqu’il a obtenu des dépouilles. » Et pourquoi d’autres ambitieux, en Afrique et en Asie, ne rêveraient-ils pas d’obtenir des dépouilles à leur tour ?...