Extrait du journal

En vérité, il y a des choses difficiles à faire comprendre et non des moins claires. De ce nombre est le droit des tribunaux de première instance à être élevés à une classe supérieure lorsque la population de leur résidence atteint un certain-chiffre. La loi du 80 août 1883 ne laisse aucun doute à cet égard. Elle a établi trois clas ses de tribunaux : ceux qui étaient instal lés dans des villes de moins de vingt mille âmes fifrent placés en troisième classe ; si la population atteignait vingt mille âmes, le tribunal fut de dèuxième classe ; si la population atteignait quatre-vingt mille âmes, le tribunal fut de première classe. Notez bien ce mot « atteindre » dont a usé le législateur de 1883. Il a une double valeur. D'une part, il coupe court à toute objec tion tirée d'une faible augmentation de population. M. Fallières, dans une visite que j'eus l'occasion de lui faire avec mes collègues de Nancy et de Sedan, éleva un instant cette objection. En .se référant au texte de la loi, il dut reconnaître que le mot « atteindre » rétorquait son argument. D'autre part, ce mot essentiel enferme à mon avis quelque chose d'impératif ; il ne laisse place a aucun arbitraire, à aucune interprétation limitative ; il signifie nette ment qu'il y a lieu à promotion du tribu nal dès que la population de la résidence atteint le chiffre prévu parla loi. Au lendemain de la promulgation de la loi, la question des promotions futures des tribunaux fut agitée. Le garde des sceaux d'alors, l'auteur même de la loi, M. Martin Feuillée s'exprime ainsi dans une circulaire en date du 11 octobre 1883 : « Ce n'est qu'après chaque recensement » que des modifications peuvent être ap» portées dans la classe des tribunaux, et » les traitements des magistrats. » Rien de plus juste ; pendant tout l'intervalle de deux recensements il n'y a, il ne peut y avoir qu'un chiffre officiel et authentique de la population, à savoir le chiffre dé-' gagé par le récensement le plus récent. Mais'vienne un nouveau dénombrement de la population, le classement des tribu naux doit subir les modifications résul tant-des chiffres dégagés par cette opéra tion. C'est ce qui a eu lieu à la suite du recensement de 1886. En raison des effets légaux de ce recencement, les tribunaux de Belfort, Epinal, Bayonne, Lunéville, Amiens, etc., furent élevés d'une classe. On ne discuta pas sur l'accroissement de la population. On se contenta de constater que le nombre des habitants avait atteint le chiffre prévu par...