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Le Siècle, 24 juillet 1837

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Le Siècle
24 juillet 1837


Extrait du journal

tion, elle déconcerte surtout en Angleterre les nobles complices du chef des tories. C'est trop tôt briser le masque, et le nouveau roi a gâté la cause des amis de l'ancien duc. Déjà même on parle de dé clarer cet héritier présomptif du sceptre de la Grande-Bretagne dé chu de ses droits éventuels ; et en cas d'avènement, c'est tout au moins la guerre civile qu'il apporterait au royaume-uni. Qu'importe à Ernest-Auguste? L'hypocrisie même lui pesait, et sa vie n'eût pas été complète si l'on avait pu croire qu'il respectait quelque chose et si en politique il eût gardé quelques apparences de pudeur. Roi, con tentez-vous, puisque le peuple hanovrien, si l'on en juge par son si lence, paraît content. Les souverains de Naples et de Modène sont en pleine possession du droit de satisfaire leurs caprices. Lo pjcmier l'entretient par des traits de férocité auxquels la crédulité de quelques proscrits vient offrir de temps en temps matière expérimentale; le second continue à pendre et à peupler les bagnes: ce sont jeux de monarques légiti mes. La chronique moscovite nous édifiait dernièrement d'un exem ple de la justice militaire du czar. Un officier outragé par son supé rieur attend que celui-ci ait sa retraite pour lui demander raison. L'ex-supérieur refuse, et menacé par son adversaire, il le dénonce. C'est un homme dangereux pour l'état, écrit en apostille le président du conseil de guerre qui avait condamné l'officier à passer par les verges de son 'escadron. Nicolas lit l'apostille, et prenant la plume il ajoute : Le coupable passera trois fois par les verges de deux esca drons, Sanglant, la chair en lambeaux, l'officier tombe, et afin que l'arrêt impérial reçoive son exécution, le cadavre est porté par des soldats au milieu des rangs que surveille et anime le juge lui-même pour complaire à son gracieux maître. La Revue des Deux-Mondes saisit cet à-propos pour célébrer en style élégant le bonheur des su-jets, la puissance et l'aménité du maître. Nous engageons M. LoôveWeimar à demander du service en Russie et à ne pas céder aux velléités d'honneur qui pourraient lui prendre. Du reste, il est naturel qu'un autocrate ait des jouissances de plus haut goût que les rois ordinaires; et la distraction d'une torture détaillée de sa propre main est bien permise au conquérant dont la Circassie va subir les lois, si nous en croyons les formidables armemens qui la menacent. Au retour sans doute aura lieu sur Les confins de l'empire ottoman le rendez-vous entre Nicolas et Mahmoud, rendez-vous que diffère au tant que possible le sultan, par un soupçon bien injurieux et surtout bien injuste pour le caractère du czar. Nous allions oublier la moins triste et certainement la plus inno cente des satisfactions royales. Un éléphant blanc vient d'être ame né au roi de Siam, lequel avait promis une riche dot et la main de sa fille au mortel favorisé des cieux qui découvrirait l'animal sacré. Le caprice céleste a choisi pour cette découvert»! un bossu pauvre, vieux et laid. Il n'en est pas moins aujourd'hui gendre du roi, et tout le monde s'amuse pieusement à Siam et se prosterne devant le palan quin du bossu. Le souverain de France s'amuse aussi d'une manière assez bouffonne : le souverain, c'est-à-dire le peuple aux termes de la charte. Il lui prit, il y a sept ans, une humeur de conquête, et le voi là qui occupe Alger et décrète qu'il colonisera, cultivera et civilise ra l'Afrique devenue française. Sa marine, son industrie, sa gloire un peu effacée, sa sécurité même en cas de lutte sur la Méditerranée, lui paraissent également intéressées à maintenir sa colonie africaine. Hommes et trésors ne sont point épargnés pour cette œuvre. Tout à coup, il s'en dégoûte, il en fait fi comme l'enfant de sa poupée, et la jette à un Bédouin, qui ramasse de grand cœur la fortune et la puis sance qu'on lui a faites. Et en sept années, nos armes et notre argent ont constitué, sous le nom d'Afrique française, une Afrique arabe, et à la place d'un dey créé un sultan. Voilà les plaisanteries d'un peuple souverain, et lEurope de rire. Allons aux fêtes de juillet, allons rendre grâce au dieu des révolu tions qui rendent les peuples si sages. Que les orphelins des trois jours se marient sans dot, car il n'y a plus rien dans l'épargne muni cipale, où l'on vient de puiser pour les noces du prince ! Que l'image...

À propos

Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.

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