Extrait du journal

insolemment, disant au père Charrier. « Je vous ferai pair de France, quand je serai ministre. — A-t-il de l’aplomb 1 lui, ministre 1 —Et pourquoi pas? ré plique Sergiuc. Nos pères n’avaient perdu que le respect ; nous avons perdu le mépris. Ministre, il le sera. L’avenir est aux effrontés. » Tel est le dernier mot de la pièce. De bruyants applaudissement ont témoigné que le public partage l’opinion de M. Emile Augier. Un souille puissant d’honnêteté anime cette comédie, qui, à côté de la satire, contient assez de caractères nobles et francs pour réconforter les spectateurs. C’est d’abord le marquis d’Auberive au quel les désillusions de la vie et le spec tacle des turpitudes humaines ont donné un scepticisme indulgent pour les autres, sans entamer, au contraire, le respect qu’il a pour lui-même et pour son nom. Type bien vrai dans son originalité, com bien d’hommes, tout en « perdant le mépris, » pour employer l’expression du maître, gardent pourtant le respect de leur individualité isolée; et, plus ils prennent leur part de la platitude du monde qui les entoure, renonçant à s’in surger contre elle plus ils concentrent en eux le sentiment de dignité et d’honneur. Alceste a commencé par la colère ; il finit par l’ironie. Ses indignations se sont usées. Il est devenu philosophe comme Figaro;il rit de tout, non de crainte d’être obligé, d’en pleurer, mais dans la con viction que ses larmes seraient inutiles. Tant que la saturnale passe sous sa fenê tre, il sourit : si elle veut forcer sa porte, il sait la défendre comme les croyants défendent le sanctuaire de eur foi....