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Le Temps, 13 février 1934

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Le Temps
13 février 1934


Extrait du journal

L’AVERTISSEMENT Il serait vain de méconnaître l’importance de la manifestation d’hier. Sans doute, la grève dite « générale » n’a été que partielle, les ser vices publics ne furent, sauf ceux des P. T. T., que médiocrement atteints, notamment dans l’enseignement. Mais ce qui a été gravement atteint, c’est le principe même de l’ordre, c’est la légalité et, par suite, puisque la force d’un régime së mesure au respect des. lois, c’est le régime lui-même. Telle est, nous semble-t-il, la grave leçon à tirer de cette journée qui fut, malgré son déroulement pacifique — exception faite d’échauffourées isolées, une journée purement révolutionnaire. Les forces socialistes et syndicales ont pris position non pour la défense des institutions républicaines, mais pour une certaine formule politique représentée par le cartel des gau ches. Le socialisme, suivant sa nature, s’est placé hors de l’union nationale, seule capable aujourd’hui de sauver le régime et de résoudre les grands problèmes actuels. Le socialisme veut une revanche de la formation politique qui a mis le régime en péril en se manifestant incapable de gouverner. Mais à cette formation politique elle-même il n’appôrterâit, en cas de ; victoire;, qu’tm- ferment d’auto-destruction, comme il l’a fait deffùis leë''électibns deril932. lie socialisme ne veut -Le cartel que. pour faci liter l’action révolutionnaire. Ainsi le parti ra dical, qui paraît se féliciter de la. journée d’hier, porte une lourde responsabilité, puisque, en ouvrant les voies au socialisme, il précipite la République dans la révolution. Et. cette fin est inéluctable si un redressement total n’est pas entrepris, si la légalité reste plus long temps lettre morte. » L’arrêt, même partiel, des services publics sur l’ordre, du socialisme, a démontré hier la profondeur du mal. Pour la première fois, en France, une grève générale des fonctionnaires . a été ordonnée et a reçu un commencement d’exécution. -Sans doute, un certain nombre d’agents de l’Etat ont-ils pu-croire qu’en arrê tant l'activité de la nation ils venaient au. secours des libertés publiques. C’est ainsi qu’à : un bureau de poste on pouvait lire ce placard : « Trêve, apaisement, justioe, vive la Républi que ! » et au-dessous « Bureau fermé. » Mais cette conclusion démentait tout le reste. Et, précisément, la République n’est mise en péril que par la fermeture des administrations sur l’ordre des agitateurs révolutionnaires, ou même.sur.le signe de partisans qui redoutent une République de justice, d’apaisement et d’union entre Français. ■ » . Le désoïdre des esprits est donc extrême, et le désordre de l’Etat ne l’est pas moins. Que les factions révolutionnaires s’efforcent de l’aggraver;' cela va de soi. * Un- front unique s’est établi hier entre les marxistes de toutes les obédiences, entre toutes les dictatures de la révolution : dictature communiste, vacances de la légalité, tyrannie syndicale des services publics. * L’enchaînement est logique : de la mainmise sur l’Etat par les syndicats de fonc tionnaires naissent les vacances de la légalité, dont la journée nous a apporté un avant-goût, et les vacances de la légalité s’apparentent à la dictature du bolchevisme. Voilà le pire danger que courent nos institu tions, voilà le seul danger que court la démo cratie républicaine. Une décomposition d’abord lente, puis accélérée de la légalité s’est pro duite due à la faiblesse des gouvernements, aux excès des partis qui trouvaient des auxi liaires électoraux dans les syndicats de servi ces publics. Le jour est venu où les partis et les gouvernements se. sont trouvés prisonniers des forces illégales qu’ils avaient utilisées à leur profit ou qu’ils avaient laissé s’établir. * La journée d’hier s’ajoute aux scandales pour montrer que la machine est partout dé traquée et qu’une révision sérieuse de ses rouages est indispensable. •• Il faut restaurer l’autorité : de l’Etat, rétablir. le prestige de la; loi. Si l’illégalité était encore tolérée, c’en, serait fait de tout espoir de redressement. * Si; .Tes syndicats ^irresponsables pouvaient. à leur, gré et impunément arrêter la vie de la nation, la révolution socialiste serait accomplie puis que les partis marxistes fourraient, du jour; au lendemain, se substituer à l’Etat.* C’est à une tentative de cet ordre que nous avons’ assisté hier.' * Le calme relatif de ces grandes manœuvres! de la révolution ne doit pas nous illusionner.; Il démontre en effet que le désordre a une organisation, imparfaite encore peut-être, mais que l’on s’efforce de perfectionner. L’étrange essai auquel on se livre d’opposer la province à Paris, de faire croire que l’accès de dégoût, d’indignation et de colère de la capitale en face de la paralysie des institutions républicaines et de la violence concertée du cartel serait un attentat contre le régime, mon tre bien que les partis de désordre n’ont pas renoncé à la lutte. Ils veulent à tout prix et par tous les moyens — la grève des services pu blics en est un — briser l’union nationale, empêcher l’apaisement, barrer la route aux réformes nécessaires, pour rendre la démocratie habitable gt restaures l’Etat républicain....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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