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Le Temps, 31 décembre 1899

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Le Temps
31 décembre 1899


Extrait du journal

DÉMONSTRATION FAITE La manière dont M. Godefroy a présenté hier sa propre défense devant la Haute Cour, con traste heureusement avec l’attitude provocante et le ton violent que certains accusés avaient cru devoir adopter dans certaines séances de ce long procès. En quittant les allures révolution naires dont ils n’ont pas plus l’habitude que les mœurs, les royalistes reviennent aisément à leur tempérament véritable et à leurs traditions d’hommes de bon ton et de bonne .compagnie. Il faut ajouter que cette possession de soi et cette dignité, loin de nuire à l’argumentation de M. Godefroy, lui a donné plus de poids et de force. On dit ce qui noue paraît très vraisem blable et très naturel — que les juges en ont été heureusement impressionnés, en sorte que les accusés ont pu s’apercevoir que leur cause à la quelle nuisent toutes les velléités de violence et de tumulte, bénéficie, au contraire, nécessaire ment du calme et du sang-froid avec lesquels ils la défendent. Ce procès finira donc plus vite et mieux que ne le faisaient présager ses commencements orageux. Que la sentence qui le clora soit indul gente ou sévère, et plus probablement indul gente, il est évident aujourd’hui que ceux qui y ont été compromis sont guéris pour longtemps de l’envie de se jeter dans une si folle et si sté rile équipée. Non seulement leurs personnes n’en sortent pas grandies, mais encore_ leur cause n’y trouvera pas le bénéfice de la réclame que d’abord ils se promettaient pour elle. Ils doivent être assez punis en eux-mêmes quand ils comparent le résultat de leur aventure aux sacrifices qu’ils lui ont faits et aux dangers qu’ils ont courus. La disproportion est telle en tre leurs rêves passionnés et les moyens d’ac tion dont ils disposaient, que leur tentative de révolution violente a paru plus ridicule que sé rieuse ; que rien n’a pu vaincre le dédain ou l’indifférence du public à leur endroit; qu'ils ont eu beau enfin hausser la voix et multiplier les gestes tragiques ils en ont été pour leurs frais, comme des acteurs qui joueraient des rô les de convention devant des spectateurs qui re fusent de se laisser émouvoir. A ce point de vue, le procès dont on entrevoit le dénouement assez prochain, n’aura pas été i^ïilhiïà m&m miïMçBmrsRS démonstration générale et péremptoire aura été faite. Il est aujourd’hui démontré — èt tous les partis pourront profiter de la leçon — que toute tentative de changer par la force la forme du gouvernement, toute révolution violente faite dans la rue sont devenues impossibles, parce que la majorité veut encore moins du procédé que de la solution politique que le procédé de vrait amener. La situation générale parfois peut paraître troublée; mais jamais ce pays-ci ne fut moins d’humeur révolutionnaire. Avant tout, il se défie de ceux qui le veulent surprendre et faire son bonheur sans lui demander son avis. Cette conviction est certainement faite dans l’esprit dé tous les accusés. S’ils se défen dent d’avoir tramé un complot ou un attentat, ce n’est pas seulement parce qu’ils jugent irré gulière cette façon d’installer un prétendu ré gime d’ordre et de paix sociale, c’est encore et surtout, parce qu’ils constatent aujourd’hui la vanité de tels calculs et la chimère de telles espérances. C’est la moralité intime et latente de tout le discours de M. Godefroy, dont le der nier mot est à rdfcueillir parce qu’il est d’une frappante justesse : « Si la République savait faire le bien et la grandeur de la patrie, lé Sénat n’aurait plus de royalistes, et nous oserons même ajouter, ni d’autres factieux à punir. » Si les coups de force sont devenus impossi bles, c’est qu’ils sont illogiqùes au premier chef dans un pays de suffrage universel. Une démo cratie qui a l’ambition de se gouverner ellemême, ne peut voir qu’avec dédain ou colère ceux qui, pour faire son bonheur, commencent par piétiner tous ses droits et briser l’instru...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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