Extrait du journal

Je laisse la prose, problème difficile entre tous, pour venir à la poésie, dont notre auteur s'occupe beaucoup, esquissant par toucher une poétique autre que celle de Valéry, et/ peut-être plus hardie. Je trouve en Joubert cette idée étonnante (II p. 525) : « Et de même qu'il faut du soin pour faire un véritable vers, avec cette mesure, il faut aussi du soin pour n'en faire que de la prose ». Autre texte non moins sibyllin (II p. 499) : « Cherchons dans les beallx.tVers les matériaux d'une belle prose. » Ces formules me jettent hors de l'histoire, dans le temps éternel de la création, où prose et vers naissent ensemble et se distinguent à peine ; c'est le moment de la rêverie poétique. D'où je comprends que le vers est un moyen d'expression naturel, inhérent au langage, idée à suivre, et qui doit mener loin. Par exemple, rien n'est plus naturel à mes yeux que La Jeune Parque ; ce sont les mots qui s'arrangent d'eux-mêmes, et alignés sur la rime, se cristallisant et formant ce beau diamant d'eau claire. On sent que le poète n'avait pas le choix et qu'il 1 a dû, ou bien écrire ce poème, ou bien ne rien écrire du tout sur cette jeune fille....