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Mercure de France, 1 mars 1936

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Mercure de France
1 mars 1936


Extrait du journal

La mort aurait grandi, s’il en eût eu besoin, Jacques Bainville. Tout Paris, dès qu’elle l’eut frappé, a compris qu’elle avait été reçue stoïquement, acceptée par lui, attendue, affrontée. Nous venions, quelques jours auparavant, de perdre Pierre de Nolhac. Et Bainville avait dit à un jeune ami : — Moi aussi, je vais mourir... Or, jusqu’à la veille de s’éteindre, la veille à minuit, sachant pourtant que le moment approchait, vraiment en pleine agonie, il travailla, il voulut travailler, faire sa besogne quotidienne. Si ce positiviste a été tourmenté vers la fin, comme deux ou trois de ses paroles peuvent le faire croire, par des idées d’éternité vivante et de consolation religieuse, personne n’a eu ses confidences. Bainville gardait fermée son intimité personnelle. Il ne le fit point sans quelque raideur. Tous, presque tous, nous le crûmes froid et dur. Mais je sais par des amis qu’en ces dernières années il s’était adouci et humanisé : preuve de toute une vie se crète, contenue, dont il emporte le poids avec lui. On pense au dieu Harpocrate, un doigt sur sa bouche. Deux phrases, l’une déjà ancienne, sur le premier amour qui, non satisfait, laisse dans le cœur des hommes un vivace souvenir, l’autre plus récente sur ceux « qui, avec leur liberté, doivent leur fortune à une déception de jeunesse et à un bienfaisant chagrin d’amour », ne 8...

À propos

Fondé en 1890 par l’ancienne rédaction de La Pléiade, Le Mercure de France devient sous la direction d’Alfred Vallette une autorité dans le monde littéraire et artistique. Héritier du Mercure Galant et des deux premières versions du Mercure de France, cette série moderne du journal étend son assise au travers d’une société d’édition publiant les principaux auteurs des diverses avants-gardes littéraires de l’époque. La revue paraît quant à elle jusqu’en 1965.

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Données de classification
  • bainville