Extrait du journal

Pour que ce raisonnement soit exact, il faut commencer par admettre, ou bien que les républicains modérés votent pour un monarchiste en concurrence avec un républicain, ou bien que l’appui donné au républicain conservateur par les organes républicains modérés ne compte pas et n’entraîne aucun élec teur. En effet, le Soleil n’a pas été le seul journal qui se soit montré sympathique au candidat « conservateur » à Ram bouillet : il avait pour compagnons de combat, — sans parler du Figaro — les Débats, la Liberté et un peu le Temps. L’influence de ces journaux serait-elle nulle et ne pourraient-ils amener per sonne aux candidats qui ont leurs bon nes grâces? M. Hervé ne le prétendra pas. M. de Caraman, « républicain conser vateur », a donc eu, à Rambouillet, non seulement les voix monarchistes, mais des voix républicaines. Aurait-il obtenu celles-ci s’il s’était présenté comme monarchiste? A coup sûr non. Et cependant, il n’est pas élu, et il sera battu au second tour de scrutin par son concurrent républicain, puisque les voix qui se sont portées contre lui for ment une majorité qui se chiffre à près de 1,800. S'il n’a pas pu sc faire élire en réunis sant, par un remarquable tour de force, les « républicains conservateurs » et les monarchistes, les amis de M. Léon Say et ceux de M. Hervé, comment se serait-il fait élire en perdant une bonne partie de ccs troupes? Voilà ce que nous serions curieux de savoir. N’est-il pas plus simple de reconnaître la vérité et d’ouvrir les yeux à la lu mière? N’est-il pas plus juste d’avouer que les monarchistes se voientabandonnés de jour en jour pas leurs électeurs et que ceux-ci « finiront bientôt par leur manquer »? M. Hervé lui-même s'est présenté naguère comme monarchiste — il le rappelait, il y a deux jours, dans le So leil — et il n’en a pas moins été battu. Et certes, s’il y avait un candidat qui, par sa valeur personnelle, méritait un bon accueil du corps électoral, c’était lui. Mais il n'a pas été le seul à se faire battre : M. Calla et certains autres ont eu le même sort. Quoi d’étonnant à ce que la tactique change et à ce que les monarchistes échaudés s’avisent aujourd’hui de se présenter simplement comme conserva teurs et même comme républicains ? Le malheur est que les électeurs voient le bout de l'oreille, et s’ils manquent à ces prétendus ralliés comme ils manquaient aux royalistes notoires, c’est tout sim plement parce qu'ils deviennent sincère ment et carrément républicains. S. Piciion....