Interview

Une histoire de la détention des mineurs en France, par Jean-Jacques Yvorel

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« Joseph Jacquiard (16 ans) et Joseph Vienny (14 ans), les deux assassins de la ferme de Jully », carte postale d'époque, 1909 - source : WikiCommons

Sujet délicat depuis toujours, la justice des mineurs va connaître plusieurs évolutions déterminantes à compter de la fin du XVIIIe siècle. Comment les enfants et les adolescents étaient-ils alors jugés ? Quel traitement leur était réservé ?

Jean-Jacques Yvorel est historien et professeur à l’ENPJJ (Ecole Nationale de Protection Judiciaire de la Jeunesse). Il est également chercheur associé au CESDIP (Centre de recherches sociologiques sur les droits et institutions pénales) et a été rédacteur en chef de la Revue d'histoire de l'enfance « irrégulière ». C'est un spécialiste reconnu de l’histoire des déviances juvéniles et de leurs traitements sociaux ou judiciaires.

On lui doit notamment  Histoire de la justice en France de la Révolution à nos jours, écrit avec Frédéric Chauvaud et Jacques-Guy Petit, et publié par les Presses Universitaires de Rennes en 2007, de même que Les Âmes mal nées : Jeunesse et délinquance urbaine en France et en Europe (XIXe-XXe siècles), rédigé en collaboration avec Jean-Claude Caron et Annie Stora-Lamarre, et paru en 2008 aux Presses universitaires de Franche-Comté.

Propos recueillis par Arnaud Pagès

RetroNews : En 1791, les députés de l'Assemblée nationale adoptent le principe de discernement qui va dès lors structurer la justice pénale des mineurs. De quoi parle-t-on ?

Jean-Jacques Yvorel : Lorsqu'un mineur de moins de 16 ans a commis un délit, le tribunal va poser une question préalable... Ce mineur a-t-il agi avec ou sans discernement ? S'il a agi avec discernement, il est condamné à une peine qui sera inférieure environ de moitié à celle encourue par un adulte, la peine de mort étant dans tous les cas écartée. Si il a agi sans discernement, il sera acquitté mais il sera, selon les circonstances, soit remis à sa famille, soit envoyé en correction pour un temps que le tribunal décidera mais qui ne pourra excéder sa vingtième année.

Cette question du discernement va créer un curieux objet juridique, à savoir le mineur acquitté mais malgré tout incarcéré. Il y a même un paradoxe s...

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