Interview

Des rapports entre justice et littérature, par Christine Baron

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Portrait d'André Gide par Henry Bataille, 1901 - source : WikiCommons

Dans son ouvrage La Littérature à la barre, la professeure de littérature Christine Baron analyse les multiples liens qu'entretiennent droit et littérature et montre comment ces deux mondes, en apparence opposés, se sont mutuellement nourris au fil des siècles.

RetroNews : Quelle parenté existe-t-il entre droit et littérature ?

Christine Baron : De nombreux liens existent entre la littérature et le droit. Bien des écrivains, particulièrement dans littérature du XIXe siècle, ont une formation juridique : Claudel a exercé une carrière de diplomate, Balzac et Stendhal ont tous deux étudié le droit. Stendhal disait d’ailleurs qu’il lisait chaque matin deux ou trois pages du Code civil, comme une sorte d’hygiène nécessaire à l’écrivain afin d’être toujours naturel.

Il existe également une proximité dans la lecture qu’on fait des textes : la tradition d’exégèse des textes de lois et la lecture savante qu’on fait des textes littéraires requièrent des compétences assez proches. L'herméneutique littéraire et l'herméneutique juridique ont souvent des critères et standards similaires.

 

Quelles sont quelques-unes des multiples manières dont la littérature a puisé son inspiration dans le droit, notamment aux XIXe et XXe siècles ? Dans quels buts ?

Je remonterais au XVIIIe siècle. C’est d’abord de l’indignation des philosophes que naît la discussion littéraire sur le droit. Pensons aux textes de Voltaire sur les affaires Sirven ou Calas. Dans son plaidoyer pour le chevalier de la Barre, Voltaire se penche sur le blasphème. Il y a une participation de l’écrivain au fonctionnement de la société civile, avec souvent un objectif : faire évoluer le droit. On retrouve chez Victor Hugo cette indignation lorsqu’il dénonce la peine de mort et la torture. Tout cela montre un intérêt de l'écrivain pour l’évolution du Code.

Et puis il y a une inspiration directe, réaliste : il suffit de trois lignes sur l’affaire Delamare dans le Journal de Rouen pour éveiller l’imagination de Flauber...

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