Chronique

1929 : les « petites Anglaises » maîtresses du scrutin britannique

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« Les élections anglaises », dessin humoristique paru dans Le Petit Parisien, 1929 - source : RetroNews-BnF

Tandis que le suffrage devient universel au Royaume-Uni comme dans l’ensemble des pays d’Europe du Nord, la presse française se prend de passion pour le futur vote des jeunes Anglaises – pour qui vont donc voter ces « flappers » ?

À la suite des Néo-zélandaises (1893), des Australiennes blanches (1901), des Finlandaises (1906), des Norvégiennes (1913) et des Danoises (1915), la quasi-intégralité des femmes des États d’Europe centrale et du Nord ont vu leur code électoral réformé entre 1917 et 1919, en reconnaissant le droit de vote des citoyennes. Cette vaste réforme a affecté tous les États situés au-dessus d’une diagonale tirée de la mer du Nord à la Mer Noire, tout en excluant la Belgique, la France, la Suisse, l’Italie et la Roumanie.

Cet octroi fut cependant émaillé, mais pas toujours, de nombreuses exceptions et restrictions locales. Au Royaume-Uni, le Representation of the People Act 1918 promulgué par le Parlement le 7 février 1918, avait ainsi intégré au corps électoral uniquement les citoyennes britanniques de plus de 30 ans disposant d’un « revenu supérieur ou égal à 5 livres, en propre ou par le mari » qui, eux, votaient désormais tous dès 21 ans révolus.

Les femmes représentaient alors près de 40% de l’électorat ; la limitation d’âge avait pour objectif de maintenir le nombre d’électrices inférieur à celui des hommes du fait du déséquilibre engendré par les pertes masculines durant la guerre. L’éventualité d’un ajustement égalitaire divisait dans les rangs Tories. Dix ans plus tard, la limite censitaire fut abolie et l’âge minimum requis abaissé au même niveau que celui des hommes. En mai 1928, par le « flapper bill », le suffrage devenait universel en Grande-Bretagne.

Cette nouvelle génération d’électrices est alors associée, par condescendance, au phénomène des « Garçonnes », dites « flappers » dans le monde anglo-saxon, assimilant les voix de 5 millions de jeunes femmes à une culture associée aux jeunes élites.

Après avoir désigné une jeune prostituée puis les danseuses de Charleston, le mot issu de l’argot anglais s’appliquait désormais à une jeune fille délurée. Popularisée en Europe à la fin des années 1920 par les spectacles et le cinéma, dont l’actrice Louise Brooks, la Flapper s’est adaptée en France, où la mode parisienne impose désormais ses propres tendances – signées notamment par Coco Chanel.

« Flapper », le mot amuse et plaît bien davantage à la presse française que son équivalent de « garçonne », trop féministe et trop subversif depuis le succès du roman éponyme de Victor Margueritte en 1922. L’expression anglaise est donc adoptée, réduite à la désignation d'adolescentes élégantes et capricieuses, de...

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