Chronique

Documenter les violences policières : un enjeu dans l’entre-deux-guerres

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« Une brute particulièrement zélée », photo parue dans Regards, 1934 – source : RetroNews-BnF

La loi sur la « sécurité globale », actuellement discutée au parlement, fédère de nombreuses oppositions. Près d’un siècle en arrière, comment la presse ouvrière abordait-elle le sujet des violences de la part des forces de l’ordre ?

Au sortir de la Première Guerre mondiale, le mouvement ouvrier est étroitement surveillé par les autorités, qui craignent des troubles révolutionnaires. À Paris notamment, la plupart des cortèges communistes et syndicaux demeurent interdits par la préfecture de police jusqu’en 1935. Dans ces conditions, de nombreuses manifestations sont réprimées et les confrontations avec les forces de l’ordre entraînent parfois la mort de manifestants.

La presse ouvrière se fait l’écho de cette répression, avec les moyens techniques de l’époque. En l’absence de smartphones pour filmer en direct sur les réseaux sociaux les confrontations, la plume reste le moyen privilégié pour rendre compte avec précision du déroulé des manifestations et de ses éventuels débordements.

Plus rarement, des photographies peuvent étayer le récit, à l’instar du magazine communiste Regards qui revient, quinze ans plus tard, sur la répression du 1er mai 1919 qui coûta la vie à un manifestant :

Le 29 mai 1921 a lieu le traditionnel défilé en hommage à la Commune de Paris, qui se tient chaque année devant le Mur des Fédérés au cimetière du Père-Lachaise. Bien que cette manifestation soit tolérée, car considérée comme un cortège funèbre relevant de l’hommage aux morts, des incidents éclatent entre communistes et forces de l’ordre. Le député de la SFIC Ernest Lafont, pris à partie par des policiers, est grièvement blessé à la tête.

Dès le lendemain, les journalistes de L’Humanité font un récit minutieux de la manifestation et des violences perpétrées par les policiers. Pointant la responsabilité du nouveau préfet de police, Robert Leullier, ils communiquent également les numéros de matricule des agents accusés de brutalité.

« Cette journée, vraiment, la police devait avoir la pudeur de ne pas la ternir. Nous croyons que ses chefs directs ne le voulaient vraiment pas.

Quelques agents sont à citer à l’ordre du jour : d’abord, l’agent 253, du 20e, qui assomma Lafont, et qui, emporté par son zèle, dégainait con...

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