Écho de presse

Splendeur et misère de Bolchevo, la commune soviétique qui accueillait les jeunes délinquants

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Un groupe artistique de la commune de Bolchevo dans L'Humanité, 1936 - source : Gallica-BnF

Entre 1924 et 1938, la Russie socialiste a expérimenté à l'échelle d'une ville l'idée d'une colonie de réintégration pour enfants et adolescents en difficulté. La presse française se pressait alors à Bolchevo, afin d'y voir la fabrication de « l'homme nouveau ».

Dans une jeune Union soviétique marquée par la guerre civile et la famine de 1921, la délinquance n'a cessé de croître sur l'ensemble du territoire. De nombreux enfants et adolescents se retrouvent dans les rues des villes et des campagnes, démunis, orphelins ou abandonnés par leurs parents partis vers des cieux plus doux.

 

Ces conditions de vie favorisent l'émergence d'une certaine délinquance de la part de ces jeunes soviétiques, enclins au vol, à la prostitution ou parfois, au meurtre. Afin de réfréner la criminalité juvénile, il a alors été convenu d'opérer une prise en charge des « voyous » par une œuvre pédagogique axée sur le travail dans des centres de détention prétendument « ouverts ». Prévenir avant de réprimer les comportements déviants, voilà l'idée.

 

Dès 1922, le fondateur et chef de la Tchéka – la police politique soviétique – Félix Dzerjinski souhaite éradiquer (ou du moins, occulter) la délinquance juvénile des grandes villes et ainsi envoyer jeunes criminels, vagabonds et prostituées dans des « colonies » pour enfants et des orphelinats pour remédier à la surpopulation carcérale. À la suite de ces premières colonies et de la célèbre colonie Gorki de Kharkiv en Ukraine, la commune de Bolchevo voit le jour en 1924, sous l'impulsion de Pogrebinski et Iagoda, président adjoint de la Guépéou. Elle accueille en son sein des enfants des rues – les « bezprizornye » –, de nombreux orphelins mais aussi de véritables délinquants récidivistes.

 

Située à 27 kilomètres au nord de Moscou, la commune jouit d'une localisation géographique judicieuse : elle est proche de la capitale, ce qui permet aux autorités d'accueillir et d'encadrer les venues de visiteurs, mais elle est également assez loin du centre de la ville pour pouvoir éloigner les jeunes des activités criminelles typiquement urbaines.

 

Les débuts de Bolchevo sont timides : cinq membres permanents recrutent dix-huit jeunes délinquants des colonies Rosa Luxembourg et de Moscou afin de les confronter au travail – et à une autonomie toute relative. On leur propose dans un premier temps des activités de forgeron, de la menuiserie et de la cordonnerie. Un travail quotidien rétribué par un salaire, d'abord en tabac, puis en roubles. Selon les textes, les jeunes délinquants sont libres de partir selon leur bon vouloir ; s'ils restent, ils doivent apprendre à s'occ...

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