Écho de presse

Londres, 1892 : une entrevue avec l'intellectuel anarchiste Kropotkine

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Portrait de Piotr Alexeï Kropotkine, par Nadar - source : Gallica-BnF

Le 27 mars 1892, tandis que plusieurs attentats d'inspiration insurrectionnelle ont lieu en France, L’Écho de Paris se rend en Angleterre pour interviewer Pierre Kropotkine, principal théoricien du mouvement anarchiste, qui y vit exilé.

Le 27 mars 1892, L’Écho de Paris, journal conservateur, publie l'interview du plus célèbre théoricien anarchiste de l'époque, le Russe Pierre Kropotkine (1842-1921).

 

Proche du géographe anarchiste français Elisée Reclus avec qui il a fondé le journal Le Révolté, lui-même géographe de formation, Kropotkine est issu de l'aristocratie moscovite. Adhérent de la Ière Internationale en 1872, il a été arrêté à Lyon en 1882 et jugé dans le retentissant « Procès des 66 » en 1883.

 

Emprisonné trois ans en France, Kropotkine s'exile ensuite à Londres, où il vit de ses écrits scientifiques. C'est là que le journaliste et dramaturge Robert Charvay vient l'interviewer en ce mois de mars.

Une visite loin d'être innocente : la France vient de connaître ses premiers attentats anarchistes. Le 11 mars, un attentat organisé par Ravachol a eu lieu contre la demeure du conseiller Benoit. Le 15 mars, c'est la caserne Lobau qui a été visée. Et le 27 – jour même où l'interview est publiée –, Ravachol commettra un autre attentat contre l'immeuble de l'avocat général Bulot : toute la presse du lendemain en parlera. Ravachol sera arrêté le 30 mars et exécuté le 11 juillet.

 

Charvay écrit :

« Dès lors et du jour où, sur le pavé parisien, les cartouches de dynamite éclatèrent, cette invincible obsession s'empara de moi : m'aboucher avec Pierre Kropotkine et connaître son intime pensée sur cette forme nouvelle et sans merci qu'affecte la bataille contre la Société moderne. Je partis donc pour l'Angleterre. »

Kropotkine, en effet, a longtemps été un apôtre de la « propagande par le fait », écrivant dans Le Révolté du 25 décembre 1880 : « La révolte permanente par la parole, par l'écrit, par le poignard, le fusil, la dynamite [...], tout est bon pour nous qui n'est pas la légalité ». En 1881, lors d'un congrès international révolutionnaire à Londres, il plaide encore en faveur de l'action violente. La même année, le tsar Alexandre ...

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