Interview

Carnaval, sacrifices et exorcismes : une histoire des rites religieux en Guadeloupe

Carte postale montrant le carnaval de Fort-de-France (Martinique), circa 1900 - source : Delcampe-WikiCommons

Département des Antilles françaises abritant nombre de communautés et autant de  religions, la Guadeloupe est le lieu d’un métissage autant ethnique que spirituel. Le philosophe Dimitri Lasserre revient sur le particularisme de ces croyances à l’échelle du monde créole.

Dans son article « Mysticisme et mondialisation aux Antilles : le cas de la Guadeloupe », le professeur de philosophie et universitaire Dimitri Lasserre démontre comment la cohabitation de diverses religions – catholicisme, hindousme, vaudou et bien d’autres – dans cette île des Antilles françaises a conduit à l’avènement de pratiques spirituelles très particulières, uniques à l’échelle du « monde créole » comme du monde tout court.

Deux grandes vagues de migrations y ont formé une société pluri-ethnique et pluri-culturelle. Dimitri Lasserre a étudié les rites – sacrifices d’animaux, carnaval, exorcismes… – de chaque communauté ainsi que ses acteurs – voyants, prêtres exorcistes, commerces ésotériques… – en vue de démontrer comment ces pratiques religieuses et culturelles, en se juxtaposant, ont donné naissance à un syncrétisme spirituel typiquement guadeloupéen.

Propos recueillis par Mazarine Vertanessian

Retronews : Dans vos textes au sujet de la Guadeloupe, vous expliquez que la diversité de ses populations s’est constituée bien en amont du phénomène de mondialisation…

Dimitri Lasserre : Il faut préciser qu’il est anachronique de parler de mondialisation pour désigner les premiers flux de migration en Guadeloupe. Au XVIIe siècle sont arrivées des populations étrangères à ces territoires, –Européens et Africains – avec la traite négrière et l’esclavage. Il y a ensuite eu l’arrivée d’une diaspora indienne au XIXe siècle.

Chacun s’est installé aux Antilles avec sa culture. Les Européens étaient chrétiens ; les Africains possédaient leurs propres pratiques occultes qui, par ailleurs, n’étaient pas uniformes ; enfin, la plupart des populations indiennes venaient du sud de l’Inde avec des pratiques mystiques spécifiques à cette région. 

Une deuxième vague migratoire, encore en cours, se compose de Français, d’Italiens, mais aussi de Libanais, de Syriens, d’Haïtiens, de Dominicains ou de Chinois. Finalement une culture mystique guadeloupéenne, très différente de ce que l’on peut trouver ailleurs dans le monde, a émergé grâce à ces arrivages de populations venant de diverses régions. 

Extrait du conte fantastique « Noël à Masselas » de la romancière guadeloupéenne Michèle Lacrosil, La Revue guadeloupéenne, 1947

Pouve...

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