Écho de presse

La maladie mise en scène : les leçons sur l'hystérie de Charcot à la Salpêtrière

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Une leçon clinique à la Salpêtrière, tableau d'André Brouillet, 1887 - source : WikiCommons

À partir de 1882, le célèbre neurologue Jean-Martin Charcot donne des leçons publiques sur l'hystérie, au cours desquelles il hypnotise ses patientes. Alors que le Tout-Paris se presse à ces séances, des critiques émergent dans le corps médical, mais aussi dans les journaux.

Janvier 1882. Parmi les gloires de la médecine française de l'époque, Jean-Martin Charcot (1825-1893) est probablement le praticien plus célèbre. Fondateur de la neurologie moderne, premier médecin à introduire la démarche scientifique dans l'étude des maladies du système nerveux, il est acclamé en France comme à l'étranger au moment où il se voit confier une chaire créée spécialement pour lui à l'hôpital de la Salpêtrière, à Paris.

Là, Charcot se livre à des travaux sur l'hystérie qui vont avoir un grand retentissement, tant dans le champ médical qu'auprès du grand public. Maladie aux contours flous (aujourd'hui exclue de la nosographie psychiatrique), « l'hystérie » est alors considérée comme une névrose spécifiquement féminine aux symptômes protéiformes : délires, syncopes, crises de nerfs, spasmes, convulsions. Charcot va ordonner ces symptômes en un modèle conceptuel qu'il nomme « grande hystérie ».

Pour ses recherches, le neurologue a recours a une méthode jusque-là décriée : l'hypnose. Rejetée par l'Académie des Sciences, qui l'identifie à ce qu'on appelait jadis le « magnétisme animal », elle est pourtant utilisée depuis la fin des années 1870 par Charcot, qui parvient progressivement à l'imposer. Pour lui, l'hypnose est assimilée à l'hystérie : c'est un moyen de déclencher et de reproduire les symptômes des hystériques en dehors des crises.

Il va s'en servir au cours de leçons qui, faisant intervenir ses patientes de la Salpêtrière, vont frapper les esprits de ses contemporains. Avant le début de ces présentations cliniques, les assistants de Charcot « préparent » les patientes par « suggestion hypnotique », puis le professeur les expose au public, délivrant son cours au fil de ce qui s'apparente à de véritables mises en scène.

Les spectateurs (médecins et étudiants, mais aussi journalistes, hommes politiques et écrivains – tous masculins) se pressent à ces leçons qui vont marquer la naissance, en France, d'une vogue durable autour de l'hypnose. Le 31 janvier, Le Rappel explique longuement l'objet de ces séances menées par Charcot :

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