Écho de presse

Nightingale, inventrice des soins infirmiers modernes

le 20/04/2021 par Michèle Pedinielli
le 02/04/2021 par Michèle Pedinielli - modifié le 20/04/2021
L'infirmière Florence Nightingale venant en aide aux blessés de Crimée, représentée dans le tableau « The Lady with the Lamp », Henrietta Rae, 1891 - source : WikiCommons

Star de son temps grâce à son action dans les hôpitaux militaires pendant la guerre de Crimée, l’Anglaise Florence Nightingale a révolutionné l’organisation des soins hospitaliers.

Devenir infirmière lorsqu’on est une jeune fille de la haute société anglaise ? Définitivement hors de question ! Nous sommes en 1855 et la jeune Florence Nightingale affronte le refus définitif de son père quant à son choix de carrière. Les hôpitaux sont faits « pour les pauvres » et il est impensable qu’une Nightingale s’y intéresse.

C’est sans compter le caractère résolu de Florence, qui sait ce qu’elle veut devenir. Elle va utiliser les voyages que toute jeune fille anglaise se doit de faire pour visiter des hôpitaux, que ce soit en Italie, en Grèce ou en Égypte.

En 1851, elle a l’autorisation de suivre une formation dans un hôpital tenu par des bonnes sœurs en Allemagne.

En 1854, l’opinion publique est informée, via les reporters sur le terrain, des conditions terribles dans lesquelles les soldats britanniques impliqués dans la guerre de Crimée sont soignés. La situation est en effet catastrophique : certains meurent de maladies avant d’atteindre le front, d’autres blessés décèdent pour des questions de transports mal organisés.

Sidney Herbert, secrétaire d’État au département de la guerre, fait alors appel à Florence Nightingale, qu’il connaît par ailleurs.

« À la requête de M. Sidney Herbert, secrétaire d'État au département de la guerre, miss Nightingale consentit à accepter le gouvernement de l'expédition. Il n'y eut pas un moment de perdu en délais superflus. […]

Le 5 novembre 1854, miss Nightingale et ses compagnes, au nombre de trente-sept, dont la plupart appartenaient, comme elle, aux rangs les plus élevés de la société, arrivèrent à Constantinople sur le Vectis. »

Le premier geste de Florence Nightingale est de réorganiser l’hôpital militaire de Scutari. Les conditions d’hygiène y sont effroyables et les infirmières commencent par nettoyer ce qui ressemble aux écuries d’Augias.

« Il y en avait qui gisaient sur un grabat, sous quelque arcade de la rue. Les salles de l'hôpital étaient bondées, on ne pouvait plus passer entre les lits. Une saleté repoussante avait tout envahi. Une odeur cadavérique flottait dans les locaux.

Personne n'était là pour fermer les yeux des agonisants, donner à boire pendant la nuit aux pauvres enfants rongés de fièvre. »

Florence Nightingale doit aussi se battre pour obtenir des médicaments et de la nourriture décente afin de sustenter et soigner les nombreux blessés.

« Les obstacles jetés sur son chemin, les restrictions systématiques, les préjugés des individus, les contestations journalières par lesquelles elle était forcée d'arracher à l'autorité une maigre allocation, nécessaire au service qui lui était confié, exigeaient d'elle infiniment plus de force et de courage que le soin des malades, jusqu'au moment où la coopération de M. Macdonald, le distributeur des fonds du Times, la mit en état de faire des approvisionnements et d'introduire partout, dans l'établissement qu'elle présidait, l'ordre et le confort. »

Cet acharnement à améliorer le sort des soldats malades est rapporté par la presse qui en fait une icône malgré elle : celle de la « Dame à la lampe ».

« On l'a vue souvent, à l'arrivée de détachement de malades, rester debout pendant vingt-quatre heures de suite, appropriant les logements, distribuant les vivres, dirigeant les travaux des sœurs […] et passant des heures entières auprès du lit des hommes dans l'agonie du choléra ou du typhus.

L'image de Florence Nightingale parcourant, sa lampe à la main, des dortoirs de plusieurs milles d'étendue, prenant note chaque nuit de l'état de chaque malade […] ne sera jamais effacée du cœur des hommes, objets ou témoins de sa charité, et la tradition de son dévouement sera à jamais conservée dans l’histoire. »

Lorsqu’elle revient en Angleterre, elle-même atteinte du choléra et affaiblie, elle est accueillie comme une héroïne.

« Au moment de son retour, le peuple anglais tout entier voulut lui témoigner sa reconnaissance. Une souscription fut ouverte, à laquelle participèrent les plus riches et les plus pauvres, et qui, en très peu de jours, dépassa un million de francs.

Il fallut que la bénéficiaire arrêtât cet élan de générosité, dont elle refusa d'ailleurs de tirer profit pour elle-même.

Elle consacra son million à la création d'une école d'infirmières et n'accepta qu'une broche offerte par la reine, sur laquelle étaient gravés ces mots : “Heureux les miséricordieux”. »

En 1859, elle fonde la première école de formation pour infirmières (aujourd’hui rattachée au King’s College de Londres).

Malgré toute sa volonté, la maladie empêche Florence Nightingale de travailler comme elle le souhaiterait. Elle se consacre à l’étude de l’amélioration de la salubrité dans les hôpitaux civils et militaires.

Podcast : « Séries noires à la Une »

La presse et le crime, un podcast de RetroNews

Peur sociale, fiction de l’anarchie, crimes politiques, chroniques du Paris des Apaches… Découvrez chaque mois un phénomène criminel par la presse dans Séries Noires à la Une.

Écouter les épisodes

Le Constitutionnel n’est pas peu fier de constater que les hôpitaux français trouvent grâce à ses yeux.

« Comparant les plans des quatre derniers hôpitaux construits en France et en Angleterre, miss Nightingale ajoute :

“Après un examen même superficiel de ces quatre plans, je crois reconnaître la supériorité des plans français ; avec quelques légers défauts, ils font voir une haute appréciation de l'importance de l'hygiène dans les hôpitaux.

Les plans anglais, au contraire, prouvent que nous avons à peine commencé à étudier cette branche de connaissances.” »

Son autre contribution décisive est le recueil de données comme base fiable d’études et de recherches. Elle intervient dans ce sens au Congrès international des statistiques, en 1860.

« Une femme devenue célèbre par son admirable charité pendant la guerre de Crimée, miss Florence Nightingale, a fait adopter par le Congrès […] des propositions tendant à recueillir sur un plan commun tous les faits de l'expérience des hôpitaux, en indiquant annuellement la maladie, l'âge, le sexe […], le nombre des admis, des guéris, des reconnus incurables, des décédés pendant l'année.

Par là, on pourrait s'assurer de la mortalité relative des divers hôpitaux, de la fréquence relative des maladies ou lésions dans les divers pays, du poids dont telles ou telles affections pèsent sur les ressources de chaque établissement. »

Jusqu’à sa mort en 1910, elle ne cessera d’étudier et de publier dans le but d’améliorer les conditions d’accueil et de soins dans les hôpitaux, et surtout, de moderniser le métier d’infirmière. Enfin, de permettre à toutes les femmes de choisir leur carrière.

« Que toutes les jeunes femmes, disait-elle, qui se sentent une vocation particulière se qualifient pour elle comme un homme le fait pour sa tâche. Ne croyez pas que vous puissiez l'entreprendre autrement. »