Chronique

La dénonciation publique sous la Révolution, une pratique citoyenne ?

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Vendeur de journaux appréhendant un noble au début de la Révolution française, estampe, 1790 - source : Gallica-BnF

Facilitées par Internet, de vastes campagnes de dénonciation se sont multipliées ces dernières années. Celles-ci, souvent confondues avec la délation, ne sont en outre pas nouvelles : depuis la Révolution française, elles interrogent les contradictions internes à la démocratie.

À l’automne 1789, Jean-Paul Marat vient de lancer son journal L’Ami du peuple. Le futur proche l’inquiète. Quelques mois après le début de la Révolution, la monarchie absolue s’est effondrée. Une constitution est en cours de rédaction. Et pourtant rien n’est joué : Marat sait que de nouvelles institutions ne suffiront pas à mettre fin aux habitudes de l’Ancien Régime, fondées sur la loi du plus fort, la corruption des agents publics, les intrigues des puissants et l’opacité du pouvoir.

Pour enraciner la démocratie et chasser les mauvaises habitudes, il faut des outils plus informels et légaux dont pourrait se saisir n’importe quel citoyen.

C’est dans ce contexte que certains révolutionnaires font l’éloge de la dénonciation publique. Jadis utilisée par l’Inquisition, la dénonciation était devenue un outil du pouvoir royal : par la procédure du monitoire, les curés pouvaient obliger leurs paroissiens à dénoncer leurs connaissances à la justice. Vingt ans plus tôt, alors qu’il habitait en Angleterre, Marat avait lu les dénonciations publiées contre George III par un certain « Junius ». Celles-ci avaient vraiment fait trembler la monarchie britannique.

Dans le contexte encore fragile de l’automne 1789, dénoncer publiquement ceux qui enfreignent les lois ou qui complotent contre la Révolution est salué comme un acte de résistance, de courage et de civisme : le nouvel ordre démocratique doit aussi s’appuyer sur la vertu des simples citoyens, dont ceux-ci pourraient être à la fois les acteurs et les garants, pour p...

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