Chronique

L’étonnante histoire de Lili Elbe, l’une des premières femmes « trans »

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Lili Elbe (à droite) en compagnie de son ami Claude, Beaugency, 1928 - source : WikiCommons

Témoignage de la liberté culturelle des années folles, le peintre danois exilé à Paris Einar Wegener, mari de l’artiste Gerda Gottlieb, décida de devenir une femme après plusieurs années de transformisme ponctuel.

Avant sa mort, le 13 septembre 1931, les journaux français ont peu parlé de Lili Elbe. L’artiste était plus connue, jusque-là, sous son nom et son sexe d’origine : ceux du peintre danois Einar Wegener, né en 1882, installé à Paris depuis 1912, époux de la peintre Gerda Gottlieb (1886-1940), elle aussi Danoise. Comme le rappelle le journal Aux Écoutes dans sa nécrologie du 26 septembre 1931 :

« Einar Wegener peignait des paysages, décrivant tour à tour les fjords de son pays, la Tour Eiffel, Versailles et ses Trianons… […]

Gerda, sa femme, se plaisait à peindre des scènes galantes, figures d’amour dans des parcs, arlequinades où des Colombines archaïques portaient de larges robes à paniers. Ils exposèrent de compagnie dans les galeries parisiennes rue Caumartin, notamment. »

Perçus comme des artistes assez mineurs – « Quelques paysages de M. Wegener ne sont pas indifférents ; les figures de Mme Wegener ont de la grâce mais sans grande consistance » écrit par exemple L’Œuvre du 27 mars 1923 – les Wegener n’auraient peut-être pas attiré l’attention des chroniqueurs s’ils n’avaient incarné, à leur manière, le « trouble dans le genre » propre aux années folles. C’est le journal Paris-Soir qui, dans son édition du 18 septembre 1931, revient avec le plus de précision sur l’étonnante trajectoire d’Einar-Lili, sous le titre « L’homme-femme » :

« [Einar Wegener] avait eu la révélation de son extraordinaire dualité sexuelle. Il était un homme, un homme parfaitement normal durant des jours, des semaines.

Puis un beau soir, la fantaisie lui prenait de revêtir une autre personnalité. Il s’habillait en femme avec une extrême élégance, se coiffait d’une perruque.

Alors il se faisait appeler Lily. Les amis qui avaient invité Einar Wegener vo...

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