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Écho de presse

La longue histoire des embouteillages parisiens

Les embouteillages n’ont pas attendu l’ère de l’automobile pour empoisonner le quotidien des Parisiens. Au XVIIe siècle déjà, des « embarras » paralysaient la capitale et agaçaient les riverains.

circulationParisautomobileurbanismeHaussmann
Nicolas Méra

Ecrit par

Nicolas Méra

Publié le

27 mars 2025

et modifié le 7 avril 2025

Image de couverture

Place de l'Opéra, un agent de la circulation à cheval au milieu de la chaussée, Agence Rol, 1928 - source : Gallica-BnF

C’est un moment d’histoire qui s’écrit dans… un bouchon. Le 14 mai 1610 à Paris, le carrosse du roi Henri IV s’arrête brusquement au milieu de la rue de la Ferronnerie. Une charrette de foin et le haquet d’un marchand de vin immobilisent le trafic. Ravaillac n’en croit pas ses yeux : profitant de l’aubaine, il saute sur la roue arrière du carrosse royal et plonge, à trois reprises, sa lame dans la poitrine du souverain… 

Le régicide aurait-il pu être évité ? Un demi-siècle plus tôt, le 14 mai 1554, le roi Henri II avait déjà tenté, sans succès, de faire dégager cette rue souvent obstruée par les voitures et les piétons.

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Pas si simple de rouler à Paris ; sous l’Ancien Régime, riverains, animaux de ferme, mais surtout voitures à bras, coches, tombereaux et fiacres hippomobiles paralysent régulièrement la circulation. Sensible dès le XVIIe siècle avec la multiplication des chaises à porteurs, importées d’Italie, cette gêne devient récurrente au Grand Siècle. Capitale des arts, des lettres et de la diplomatie européenne, Paris voit sa population exploser, passant de 300 000 à 450 000 habitants entre 1600 et 1700. Édits et lettres patentes tentent bien de juguler le trafic et d’améliorer l’état des routes, rien n’y fait : dans les rues de Paris, on s’enlise, on s’impatiente. 

« Paris est si plein de carrosses qu’on ne peut passer dans une seule rue sans embarras et sans blesser ou tuer quelqu’un »,

témoigne la princesse Palatine, belle-sœur du Roi-Soleil.

Il faut imaginer des rues étroites, tortueuses, inégalement pavées, fendues en leur centre afin de faciliter l’écoulement des eaux usées, qui se transforment généralement en bourbiers les jours de pluie et en cloaques putrides lors des grandes chaleurs. 

En l’absence de trottoirs – leur usage ne se démocratisera qu’à partir des années 1830 –, la circulation est disputée entre les piétons, les véhicules et les marchandises, sans règles strictes. La priorité revient au cocher qui aboie le plus fort ou au cheval le plus rapide ! Dans son Tableau de Paris, le chroniqueur Louis-Sébastien Mercier – lequel se plaint d’avoir été écrasé à quatre reprises – croque le chaos indescriptible qui règne à Paris dans le dernier tiers du XVIIIe siècle :

« Gare les voitures ! Je vois passer dans un carrosse le médecin en habit noir, le maître à danser dans un cabriolet, le maître en faits d’armes dans un diable, & le prince court à six chevaux ventre à terre, comme s’il était en rase campagne.

L’humble vinaigrette se glisse entre deux carrosses, & échappe comme par miracle : elle traîne une femme à vapeurs, qui s’évanouirait dans la hauteur d’un carrosse. 

Des jeunes gens à cheval gagnent impatiemment les remparts, & sont de mauvaise humeur, quand la foule pressée, qu’ils éclaboussent, retarde un peu leur marche précipitée. 

Les voitures & les cavalcades causent nombre d’accidents, pour lesquels la police témoigne la plus remarquable indifférence. »

Les problématiques liées à la circulation sont d’autant plus pressantes que le nombre de véhicules ne cesse d’augmenter. Des 300 voitures repérées dans la capitale au début du XVIIIe siècle, on en dénombre 20 000 à l’aube de la Révolution française. Excédé par un trafic de plus en plus dense, un Parisien anonyme publie en 1790 sa Pétition d’un citoyen ou motion contre les carrosses et les cabriolets, se disant prêt à sacrifier son propre véhicule pour la cause ! Même son de cloche pour le rapporteur du Journal de Paris (2 décembre 1808) :

« Depuis longtemps l’œil est offusqué par tant de rues étroites, de marchés incommodes, de carrefours anguleux qu’on rencontre dans la capitale ; 

on lui reproche de n’offrir à ses habitants et aux étrangers ni portiques pour les garantir des injures de l’air, ni bains publics pour leur salubrité, ni sûreté contre les embarras d’une circulation continuelle et d’une multitude sans cesse agitante. »

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C’est cette insécurité routière que la préfecture de police tente, au début de l’ère industrielle, de combattre. 

« Par suite de l’accroissement de la population, et des Innovations que l’Industrie a introduites dans les moyens de transport, le nombre de voitures de toute espèce s’est multiplié à Paris depuis quelques années au point de rendre la circulation très dangereuse dans divers quartiers, & qu’il en résulte à tous moments des embarras ou des accidents »,

relève-t-elle en septembre 1828 dans une ordonnance relayée par le Nouveau journal de Paris et des départemens. Comment remettre de l’ordre dans la fourmilière parisienne ? Le pavage systématique des rues, l’établissement d’itinéraires précis, la réglementation du stationnement et de la vitesse font partie des mesures pionnières appliquées dans la première moitié du XIXe siècle.

Pendant ce temps, la population de Paris continue de croître à un rythme effréné. Le cap du million d’habitants est franchi en 1850 pour atteindre une densité de l’ordre de 310 Parisiens à l’hectare.

Autant pour désengorger les rues de la capitale que pour la purger des dangereux « miasmes » qui prolifèrent dans les ruelles trop étroites, Napoléon III ordonne un grand ménage. Pour redonner son lustre à Paris, insiste-t-il, il faut l’aérer et l’embellir :

« Ouvrons de nouvelles rues, assainissons les quartiers populaires qui manquent d'air et de jour, et que la lumière bienfaisante du soleil pénètre partout dans nos murs », 

proclame-t-il en 1850. 

La campagne de travaux, confiée au baron Haussmann, est entamée trois ans plus tard. Un chantier immense s’annonce : il faut percer de grands axes de circulation, abattre les taudis insalubres, araser des collines entières… Mais le résultat en vaut la peine : en 1860, vingt minutes d’omnibus suffisent pour traverser la cité de part en part.

« Cette fois, Paris était sauvé », se réjouit Théodore Gosselin dans  Les Annales politiques et littéraires du 12 septembre 1926.

« Les longues et larges avenues, rayonnant dans tous les sens, allaient offrir aux véhicules meurtriers des pistes si vastes et si directes que c’en était bien fini des engorgements.

En supposant que toutes les voitures de France se donnassent rendez-vous, il y resterait toujours de la place pour circuler à l’aise. »

Hélas, l’optimisme post-haussmannien allait s’avérer de courte durée. A l’été 1898, le Jardin des Tuileries accueille pour la première fois l’Exposition internationale d’automobiles – on l’appelle aujourd’hui Salon de l’Auto – où plus de 300 modèles estampillés Panhard, De Dion Bouton, Daimler ou Berliet ébouriffent les visiteurs. Brusquement, l’automobile s’empare de Paris : c’est de la capitale que partent les premières courses, à Paris que siègent les rédactions spécialisées. C’est aussi là, au croisement des boulevards Sébastopol et Saint-Denis, qu’apparaît, en 1923, le premier feu de circulation devant lequel des générations d’automobilistes allaient s’impatienter.

Malgré les réactions scandalisées d’écologistes d’avant-garde (qui s’inquiètent de la nocivité des fumées d’échappement) et de riverains excédés par les moteurs qui pétaradent et les voitures qui les frôlent, l’automobile se démocratise en quatrième vitesse, au nom du progrès technique et de la modernité. En moins d’un demi-siècle, la voiture passe du statut de curiosité mondaine à celui de bien de consommation courante, comme le souligne L’École et la vie du 8 décembre 1934 :

« L’automobile, considérée il y a moins de trente ans comme un véhicule de luxe, réservé aux gens fortunés, est devenue un instrument de travail, encore onéreux, sans doute, mais pratique et commode pour tous ceux que leur métier oblige à des déplacements fréquents.

C’est pourquoi la circulation des véhicules automobiles a cru, depuis vingt ans, dans des proportions formidables. On a pu calculer qu’aujourd'hui un Français sur vingt-quatre possède une voiture automobile, une camionnette ou un camion, ce qui représente environ 1 800 000 voitures en circulation.

Placées sans intervalle les unes derrière les autres, toutes ces voitures représentent une longueur égale à plus de neuf fois la route de Paris à Marseille. »

Ainsi l’embouteillage, contrariété qu’on pensait évacuée par les grands travaux, revient hanter les Parisiens. On dénombre 400 000 immatriculations dans la capitale en 1938, 1 200 000 en 1960, 2 364 000 en 1970. Les grands boulevards sont submergés. Comment absorber tant de trafic ? On envisage un temps d’inaugurer des radiales autoroutières traversant la capitale – et même de bétonner la Seine ! – jusqu’à ce que le choc pétrolier de 1973 ramène tout le monde à la raison. 

Dès lors, la municipalité entame sa longue lutte contre la prolifération de la voiture : règlementation du stationnement (les premiers parcmètres apparaissent en 1971), piétonnisation de certains quartiers, promotion des transports en commun (extensions du métro, entrée en service du RER), aménagement des « couloirs de courtoisie » pour les vélos…

Et si les embouteillages demeurent, de nos jours, un incontournable de la routine francilienne, force est de constater le désamour des Parisiens pour la voiture : aujourd’hui, deux tiers d’entre eux n’en possèdent pas.

Mots-clés

circulationParisautomobileurbanismeHaussmann
Nicolas Méra

Ecrit par

Nicolas Méra

Nicolas Méra est auteur de vulgarisation historique. Il a notamment fait paraître aux éditions Vendémiaire le Dictionnaire des sales boulots (2022) et il édite le blog Le Fil de l'histoire.

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