En 1940 les Roms, en particulier étrangers, apparaissent cependant bien comme marginalisés et largement représentés comme incapables de s’intégrer. Refusant qu’on demande désormais un carnet anthropométrique aux forains, qui eux sont considérés comme « des Français comme les autres », un article du Jour, du 20 mars 1940, évoque cette « population sans patrie et souvent sans métier et sans religion » qu’on devine être les Roms étrangers.
Avec l’entrée en guerre, les mesures se radicalisent, devenant synonyme de privation de liberté. Le 6 avril 1940, la IIIe République assigne ainsi à résidence tous les nomades. En octobre 1940, comme elle le fait dès février en Tchécoslovaquie pour les « romanichels qui n’ont pas de métier régulier », l’Allemagne nazie les fait interner dans des camps de travail (6 000 à 6 500 personnes), ne faisant pas de différence entre les différents groupes, en dépit des protestations des forains. La gestion du camp est cédée aux autorités de Vichy, qui facilitent leur déportation vers les camps de concentration et d’extermination nazis.
En effet, loin de considérer les Roms comme des aryens, les politiques raciales nazies en font la seconde population européenne victime d’une extermination planifiée en Europe : le Porajmos (« dévorer »), ou Samudaripen, c’est-à-dire le génocide tsigane. En France, ceux qui n’ont pas été déportés, ne seront libérés des camps qu’en 1946…
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Pour en savoir plus :
Henriette ASSÉO, “Figures bohémiennes et fiction, l'âge des possibles 1770-1920”, Le Temps des médias, 1(1), 12-27, 2010
Henriette ASSÉO, “L’Odyssée des Tsiganes”, L’Histoire, Collection 43, avril-juin 2009
Marie-Christine HUMBERT, Roms. Histoire. L’internement en France 1940-1946, Projet Education des enfants Roms en Europe, Conseil de l’Europe
Dominique KALIFA, Les bas-fonds. Histoire d’un imaginaire, Paris, Seuil, « L’Univers historique », 2013
Jean-Pierre LIÉGOIS, Roms et Tsiganes. La Découverte, « Repères », 2019
Mathieu PLÉSIAT, « ‘Roms’, ’Gens du voyage’ et ’exclus sociaux’ : Les destinées catégorielles des ‘Tsiganes nomades’ au cours du XXe siècle » in : Paul Bauer, Christian Jacques, Mathieu Plésiat, Máté Zombory, Minorités nationales en Europe centrale. Démocratie, savoirs scientifiques et enjeux de représentation, Prague, CEFRES, 2011, pp.71-88
Alain REYNIERS, “La mobilité des tsiganes en Europe : entre fantasmes et réalités”, Hermès, La Revue, 2(2), 107-111, 2009
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Cet article a été rédigé par trois étudiantes du campus européen de Sciences Po à Dijon, encadrées par notre collaboratrice l’historienne et chargée de conférences Rachel Mazuy.