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Interview

Le long combat des femmes pour jouer au football

Né dans les usines britanniques pendant la Première Guerre mondiale, le football féminin s’impose en France dans les années 1920.  Mais face aux critiques des médecins ou à l’indifférence des fédérations, la pratique décline, jusqu’à son interdiction sous le régime de Vichy en 1941. Laurence Prudhomme-Poncet, docteure en Sciences du sport et professeure d’EPS, revient sur cette histoire semée d'embûches. 

football

Propos recueillis par

Marie Le Roch et Alexandre Janvier

Publié le

22 juillet 2025

et modifié le 22 juillet 2025

RetroNews

Où commence l’histoire du football féminin ?

Laurence Prudhomme-Poncet

Le football est apparu en Grande Bretagne à la fin du XIXe mais c’est surtout au cours de la Première Guerre mondiale qu’il va se développer. En Angleterre, ce sont des équipes d’usine qui sont créées, et en France au sein d’associations féminines d’éducation physique. Je dirais que l’année qui marque le début du football féminin en Europe, c’est surtout l’année 1917.

Est-ce que les femmes qui jouaient au football à cette époque-là considéraient cette pratique comme un acte militant et politique ?

Les joueuses n’ont pas conscience qu’on les considérera ensuite comme des militantes de l’émancipation des femmes. Mais certaines féministes vont chercher à les inclure dans leur mouvement en finançant notamment une coupe de football : « la française », du nom du journal féministe. Mais ça ne va pas vraiment fonctionner, elles n’arriveront pas à grossir les rangs des militantes parmi les sportives. Toutefois Alice Milliat, qui était dans l’association Fémina sport au sein de laquelle le football féminin s’est développée, va chercher à développer la pratique féminine, lui assumer une place, puisque les mouvements masculins l’ignorent et refusent de s’en occuper. Et elle va, à sa façon, militer pour le droit des femmes et des sportives en général.

Pouvez vous nous en dire un peu plus sur le Fémina Sport, comment ce club à été créé ?

Le Fémina Sport a été créé en 1912. A l’origine, c’était une association de gymnastique et d’éducation physique. Progressivement, le club se met à pratiquer d’autres activités : de la boxe, mais conçue plutôt comme de la gymnastique, de la natation, puis des sports athlétiques (de la course, des sauts, des lancers). En 1917, le club propose à ses sociétaires de jouer au football. Le premier match qui apparaît dans la presse en septembre 1917, c’est un match entre deux équipes du Fémina Sport. Et puis comme il n’y a pas d’autres équipes pour jouer contre elles, les premiers temps elles vont rencontrer des équipes de garçons, des équipes de prestigieux lycées parisiens. De nouvelles équipes parisiennes vont se créer, notamment En Avant, Academia et un mini championnat à deux équipes, puis trois équipes, va se monter. Un championnat qui va grossir au début des années 1920. Et qui va perdurer jusqu’en 1933. Après il y a d’autres championnats qui ont essayé d’être mis en place mais finalement le football féminin disparaît en 1937.

Dans les années 1920, est-ce que le public vient en nombre assister aux matchs de football féminin ?

Seuls quelques curieux assistent aux premiers matchs autour du terrain. Ce sont les rencontres franco-anglaises qui vont amener le public dans les stades et dans les tribunes. Le premier match France-Angleterre en 1920 attire un public très nombreux, un public de curieux. Mais très vite, les médecins, les sportifs, les éducateurs vont critiquer ce football pratiqué par les femmes. Jusqu’en 1923 ce sera une période de développement, mais à partir de cette date il se meurt progressivement face aux critiques véhémentes auxquelles il doit faire face.

Comment explique-t-on ces voix qui s’élèvent contre le football féminin ?

Au moment de la guerre,  il y a un contexte favorable puisque le sport se développe, les hommes sont au front, les femmes s’organisent et s’investissent dans des activités qui ne sont à priori pas les leurs. Mais très vite après la guerre, alors qu’il y a eu beaucoup de morts, les femmes doivent produire pour la nation des enfants sains et robustes. Donc on attend d’elles qu’elles ne passent pas leur temps sur les terrains de sport, mais qu’elles s’occupent de régénérer la France. Si des activités comme la gymnastique par exemple sont pour certains médecins des activités à encourager pour permettre aux femmes d’être en meilleure santé, et pour leur permettre de mettre au monde des enfants en meilleure santé également, à l’inverse, nombre de médecins considèrent le football comme une activité violente qui risquerait de porter atteinte à la maternité et au corps des femmes.

Quel rôle a joué la presse ?

J’ai surtout étudié L’Auto, l’ancêtre de l'Équipe, qui écrit des articles pour parler des résultats des matchs et publie quelques articles sur la pratique du sport féminin et du football dit féminin. Mais très vite, le journal se fait aussi le porte-parole des médecins et des éducateurs qui sont contre cette pratique. Et ce sont essentiellement dans les journaux comme l'Éducation féminine, des journaux qui sont portés par la Fédération féminine et sportive, qui prône le développement du football féminin, mais dans les autres journaux, la parole des détracteurs prend de plus en plus de place.

Certains articles de journaux proposent d’adapter les règles au football féminin, est-ce ça a été mis en place ?

Très vite, la Fédération féminine, qui organise les rencontres de football, va adapter, adoucir, édulcorer comme on peut le lire dans la presse les règles du jeu, avec notamment un ballon plus léger, un temps de jeu réduit, un terrain plus petit, des coups interdits, donc l’idée est de restreindre les opposants au football en cherchant à leur donner une version plus acceptable.

Les dirigeants et les arbitres sont-ils des hommes ou des femmes ?

Pendant cette période-là, ce sont essentiellement les hommes qui connaissent cette pratique, pour lesquels ils ont joué ou œuvrés par eux-mêmes, donc ce ce sont essentiellement des hommes qui sont à la direction des associations féminines et ce sont souvent eux, des joueurs, qui lancent la pratique, qui viennent aider les femmes à s’entraîner et découvrir les nouvelles pratiques. Il y a eu des tentatives de la Fédération féminine d’avoir ses propres arbitres féminines avec des formations de quelques heures, de quelques jours, et il y a quelques joueuses qui sont devenues arbitres mais elles ont peu officier dans les faits.

Que se passe-t-il pour le football féminin à partir des années 1930 ?

C’est le déclin. Le football féminin disparait progressivement dans les années 1930. En 1941 le gouvernement de Vichy interdit sa pratique et il faut attendre les années 1960-1970 avant que la pratique soit à nouveau reconnue par les fédérations. Cela marque un coup d’arrêt à ce moment, alors que le football masculin se développe considérablement notamment avec la première coupe du monde en Uruguay en 1930. C’est un arrêt complet pour le football féminin alors que le football masculin lui prend son essor à ce moment-là.

À quel moment la Fédération française de football commence-t-elle à s'intéresser au football féminin ?

La Fédération française de football qui s’en est complètement désintéressée pendant de nombreuses années, finit par le reconnaître dans les années 1970 mais vraiment sous la pression des acteurs et actrices de terrain, mais réellement chercher à le développer. Elle souhaitait surtout que le football pratiqué par les femmes ne se développe pas dans une autre fédération, une fédération féminine comme ça avait été le cas pendant l’entre-deux guerre. Son souhait à ce moment-là est de l’intégrer pour pouvoir mieux la contrôler. C’est vraiment une préoccupation très récente que de vouloir développer la pratique du football par les femmes au sein de la Fédération et notamment à partir de 2011, première fois où l’équipe de France féminine termine dans le dernier carré pour la coupe du monde qui se déroule en Allemagne, à un moment où il y a peu de compétitions durant cet été là, il y a eu le scandale de l’équipe de football masculine l’année précédente en Afrique du Sud, donc il y a un contexte assez favorable. Et puis il y a l’OL. L’équipe féminine de l’OL qui commence à faire parler d’elle, gagner des rencontres prestigieuses et progressivement la Fédération va s’y intéresser. 

Qu’en est-il du football amateur ?

Quand j’ai étudié la question, autour des années 2000, il y avait 4% de licenciées, on est maintenant à 10%, pas loin de 200 000 pratiquantes. Donc effectivement il y a eu une explosion ces dernières années. Mais ce n’est pas pour autant que le football féminin est considéré de nos jours comme un vrai football, il peine encore à être reconnu et est souvent considéré comme un sous football, le seul football considéré étant celui pratiqué par les hommes.

On se rend compte aujourd’hui que les garçons ont les meilleurs créneaux d’entraînement, les meilleurs terrains et le meilleur matériel. Encore aujourd’hui en fait les sections féminines héritent des anciens maillots des garçons, des anciens ballons des garçons ou des créneaux horaires qui ne sont pas les meilleurs. S’il y a des économies à faire, ce sera forcément des économies par rapport à l’équipe des jeunes filles ou des femmes, même si les femmes jouent à un meilleur niveau que les équipes masculines au sein de ce même club. On l’a vu notamment au moment du covid ou la variable d’ajustement était souvent les équipes de femmes.

Mots-clés

football
MLR

Ecrit par

Marie Le Roch
AJ

Ecrit par

Alexandre Janvier
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