Écho de presse

Un génie du Mal dans l'Allemagne de l'entre-deux guerres : le Docteur Mabuse

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Affiche française du film de Fritz Lang, Le Testament du docteur Mabuse, 1933 - source : WikiCommons

L’effrayant personnage du Docteur Mabuse apparaît pour la première fois en 1922 dans Docteur Mabuse le joueur. En 1933, sa suite, réalisée elle aussi par Fritz Lang, sera interdite par les nazis : ce sera le dernier film allemand du réalisateur, qui s’exilera en France puis à Hollywood.

Génie du crime et hypnotiseur aux multiples identités, le Docteur Mabuse est l’un des « méchants » les plus célèbres de l’entre-deux guerres, à l’égal d’un Fantômas ou d’un Fu Manchu. Cette figure du Mal absolu est née en 1921 sous la plume de l’écrivain luxembourgeois Norbert Jacques. Mais c’est un cinéaste, l’Allemand Fritz Lang, qui va faire de lui un personnage mythique.

En ce tout début des années 1920, Fritz Lang n’est encore qu’un jeune réalisateur : prometteur, il vient d’emporter l’adhésion de la critique avec Les Trois lumières (1921). Docteur Mabuse le joueur (1922), qu’il réalise d’après le roman de Norbert Jacques, sera le premier long-métrage mettant en scène le diabolique malfaiteur.

S’inscrivant dans le courant expressionniste alors en plein essor (Le Cabinet du docteur Caligari de Robert Wiene date de 1920), Fritz Lang signe avec Docteur Mabuse le joueur un récit policier, mais aussi une fresque sur l’Allemagne de Weimar, durement touchée par le chômage et l’inflation. A la tête d’un réseau de criminels, le personnage éponyme y cherche, par l’hypnose et la manipulation, à asseoir son pouvoir sur Berlin.

Grand classique du film muet, le film s’inscrit aussi dans la lignée des serials, ces récits feuilletonnants qui, des Vampires de Louis Feuillade à Fantômas d’Edward Segwick, triomphent à l’époque. Grand succès en Allemagne, le film sort en France en 1924. Il est reçu par la critique comme un film dans le genre de Caligari, d’une modernité « spécifiquement allemande ». L’Avenir écrit :  

« C'est une des plus parfaites expressions de la technique allemande. On retrouve dans ce Docteur Mabuse, frère spirituel du Docteur Caligari, toute la morbidité et toute l’étrangeté qui donnèrent au film de Robert Wiene la valeur que l’on sait.

Nous sommes, là encore, en pleine folie quaccusent des déformations de décors et des scènes violemment dramatiques. »

Pour La Presse aussi, le film est un accomplissement du cinéma d’outre-Rhin :

« Sous des allures de film policier, cette œuvre est très représentative de la mentalité moderne germanique. La vérité est toujours serrée de très près par une interprétation émouvante. La photographie est expressive et parfaite, les décors, les types donnent une impression de volonté et de puissance artistiques.

D'ailleurs, Fritz Lang, le réalisateur de cette œuvre est maintenant classé parmi les plus grands metteurs en scène du monde. Ce n'est que justice. »

C’est dans un contexte complètement différent que sort la suite, onze ans après. Toujours signé Fritz Lang, Le Testament du Docteur Mabuse (1933) est cette fois un film parlant. Et son auteur un des noms les plus prestigieux du cinéma européen, avec à son actif plusieurs réalisations qui ont marqué leur époque, en particulier le monumental Metropolis (1927) et le chef-d’œuvre du suspense M le Maudit (1931).

Dans Le Testament du Docteur Mabuse, le fameux criminel (joué par Rudolf Klein-Rogge) est cette fois interné dans un asile psychiatrique. Depuis sa chambre, il continue d’échafauder des plans à la logique implacable. Dehors, des malfaiteurs obéissant à des ordres mystérieux - ceux de Mabuse ? - sèment la panique...

Lorsqu’il sort en France en 1933, le fi...

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