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Écho de presse

14-Juillet : la fête nationale sous le regard des dessinateurs de presse

À l'image du 14-Juillet 1945, certaines fêtes nationales ont connu des célébrations plus intenses qu'à l'accoutumée. Retour en dessins de presse sur plusieurs « grandes heures » du 14-Juillet aux XIXe et XXe siècles.

dessins de presse14 juilletfête6 février 1934armisticePolitique

Ecrit par

Aurélie Desperieres

Publié le

9 juillet 2025

et modifié le 10 juillet 2025

Image de couverture

Dessin d’André Fougeron, dans le supplément spécial de Ce Soir, 14/07/1945 - source : RetroNews-BnF

De sa création officielle en 1880 à nos jours, la perception et l'importance de la fête nationale ont évolué au gré des différents événements qui ont secoué le pays. À certaines dates de notre Histoire, les célébrations ont dépassé le cadre traditionnel des défilés, des bals et des feux d'artifice pour revêtir une toute autre dimension : en 1880, aux lendemains des deux guerres mondiales, après le choc du 6 février 1934 ou encore à l'avènement du Front populaire. Les dessinateurs de presse ont su capter et traduire, en quelques traits, l'esprit ainsi que les enjeux de ces « grandes heures » de la fête nationale.

1880

En 1880, dès le lendemain du 6 juillet, jour de la promulgation de la loi fixant la fête nationale au 14 juillet, les préparatifs de la première fête nationale officielle accaparent les colonnes des journaux proches du pouvoir en place. Ainsi, La Nouvelle Lune, hebdomadaire satirique républicain fondé quelques mois plus tôt, y consacre une très grande partie de son édition du 11 juillet. En Une, la traditionnelle caricature est remplacée par un dessin à la gloire de la journée à venir :

La composition est signée d'un jeune artiste qui connaîtra une longue carrière, Émile Cohl, de son vrai nom Émile Courtet (1857-1938). Après plusieurs tentatives infructueuses pour lancer sa propre revue satirique, il intègre l'atelier d'André Gill (1840-1885) en 1878. Un an plus tard, ses premiers dessins paraissent dans Le Carillon puis dans L'Hydropathe et Le Tout-Paris. À partir de mai 1880, il fait partie de l'équipe de La Nouvelle Lune et y publie des planches hostiles aux jésuites. 

Comme son maître André Gill, Émile Cohl est profondément républicain. Quelques jours avant le 14-Juillet, il réalise donc un dessin très favorable à la nouvelle fête nationale.

Au centre, il reproduit la statue installée sur la place de la République. Choisie à la suite d'un concours lancé en 1879 par Ferdinand Hérold, le préfet de Paris, la représentation de la République du sculpteur Léopold Morice n'est encore, en 1880, qu'à l'état d'ébauche. Une maquette grandeur nature est réalisée à la hâte en plâtre mélangé à du foin et à des chiffons pour veiller, telle une fée protectrice, au bon déroulement des festivités de la première fête nationale. Drapée à l'antique et portant un bonnet phrygien, elle brandit un rameau d'olivier, symbole de paix. Pour bien montrer que la République resplendit, qu'elle n'a jamais été aussi forte et que ses principes se diffusent peu à peu, Émile Cohl entoure la tête de la statue de rayons.

Tout autour d'elle, des drapeaux tricolores se déploient en éventail. Le dessinateur fait ici référence à l'importante fête des drapeaux prévue à Longchamp à l'occasion du 14-juillet. Différents corps d'armée, largement associés aux festivités, doivent en recevoir un. Dans la composition d’Émile Cohl, ces drapeaux constituent symboliquement une barrière protectrice autour de la République.

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Écho de presse

Le tout premier 14-Juillet en 1880

Le tout premier 14-Juillet en 1880

La prédominance du bleu accentue l'aspect apaisant de la représentation de la République. Le rouge, couleur plutôt associée à la révolte (et au souvenir douloureux de la Commune), est relégué au bas du dessin où une cocarde rappelle les dates chères aux républicains : la révolution de 1789 qui mène à la Ière République de 1792, celles de 1830 et de 1848 avec la fondation de la IIe République puis l'instauration de la IIIe République le 4 septembre 1870.

Au cœur de la cocarde, l'année 1880 est inscrite entre les mots « Labor/Travail » et « Pax/Paix ».

À travers son dessin, Émile Cohl résume les moments forts de la fête mais il entend également mettre en lumière la signification de cette journée : achever la longue période d'instabilité qui a débuté avec la révolution de 1789 et marquer l'implantation désormais solide de la République, régime politique qui doit garantir la paix mais aussi assurer un avenir radieux au pays.

1919

Après quatre années de conflit et quelque 1,7 million de Français disparus, le gouvernement souhaite célébrer la paix retrouvée par l'organisation d'un imposant défilé militaire le long d'un parcours chargé de sens : de l'arc de Triomphe à la Concorde. Aux côtés des soldats français, véritables héros du jour, plusieurs unités des pays vainqueurs sont invitées à descendre, elles aussi, les Champs-Élysées sous les acclamations de la foule.

Pour Le Journal, Lucien Métivet (1863-1932) résume le déroulement et l'objectif de cette journée dans une composition aux couleurs du drapeau tricolore :

Au milieu du public, encadrée par un officier et un poilu qui tiennent solidement les rênes de son beau cheval blanc, Marianne rayonne. Deux statues de Niké, déesse de la victoire et du triomphe, déposent une couronne de lauriers sur la tête des deux combattants. La présence de différents drapeaux, notamment ceux de la Grande-Bretagne et des États-Unis, évoque, quant à elle, la participation des autres nations victorieuses.

Selon l'artiste, la cérémonie entend à la fois célébrer les héros de la Guerre, montrer que la France a retrouvé sa puissance et ouvrir une nouvelle page de l'histoire du pays :

« Gloire à la France d'hier et vive la France de demain ! »

1935

Seize ans plus tard, l'union nationale n'est plus qu'un lointain souvenir. Depuis les événements du 6 février 1934 qui ont révélé la force de l'extrême droite et provoqué, en réaction, un rapprochement des différentes composantes de la gauche, les tensions dans le pays sont vives. Dans ce contexte, chaque camp veut profiter de la fête nationale pour afficher sa puissance. Deux défilés concurrents sont organisés : celui de l'extrême droite sur les Champs-Élysées et celui de la gauche de la place de la Bastille à celle de la Nation.

Le 12 juillet, dans Le Petit Parisien, Henri-Paul Gassier (1883-1951), caricaturiste aux opinions politiques de gauche, résume ce 14-Juillet hors du commun en dessinant, sous un soleil de plomb, un gendarme chargé de séparer les deux cortèges. Sa réflexion traduit la déception de beaucoup face aux divisions de la France :

« Et il y en a qui appellent ça une fête nationale ! »

Même si tout est mis en œuvre pour éviter que les deux défilés ne se croisent – panneaux « sens interdit » –, une confrontation est à craindre. À gauche, derrière le colonel de La Rocque, les membres de la ligue d'extrême droite les Croix-de-Feu sont bien identifiables avec leurs bérets noirs, leurs insignes à la boutonnière et leurs moustaches « à la Hitler ». À droite, aux côtés des leaders de la SFIO et du Parti Communiste Français, Léon Blum et Marcel Cachin, des ouvriers portent un panneau « Front populaire » surmonté d'un bonnet phrygien. Ce symbole de la République et de ses valeurs tranche avec l'insigne des Croix-de-Feu que ses membres ont placé au sommet de leur pancarte : une tête de mort reposant sur deux glaives et sur une croix décorée de langues de feu…

1936

Un an plus tard, le Front populaire, désormais au pouvoir, organise une grande fête. La droite, qui fustige depuis des mois la politique du nouveau gouvernement, voit d'un mauvais œil cette démonstration de force de la gauche. À quelques jours du grand événement, le 10 juillet, Roger Roy, dans le quotidien d'extrême droite Gringoire, raille ce 14-Juillet de la coalition de gauche :

Au centre de la piste de danse de ce bal animé par un tonitruant orchestre, les différents membres du Front populaire évoluent en couples : Marcel Cachin, Jacques Duclos, Vincent Auriol, Léon Blum, Cécile Brunschvicg... Pour fausser l'image du succès de la gauche que doivent renvoyer les festivités du 14-Juillet, le dessinateur suggère que les mésententes internes sont nombreuses, et que l'union ne serait, en réalité, qu'une façade : certains danseurs semblent peu apprécier leur partenaire et la légende se veut ironique.

1945

Après plusieurs années de guerre et d'occupation, le 14 juillet 1945 est célébré en grande pompe : défilé militaire, fête nautique, bals... Pour l'occasion, le quotidien communiste Ce Soir édite un supplément spécial intitulé «  14 juillet de la Renaissance Française ». Sur la couverture, une grande composition aux couleurs tricolores signée du peintre André Fougeron (1919-1998) retient l'attention du lecteur :

Soutenue par un soldat et un ouvrier, Marianne, coiffée du bonnet phrygien, nourrit au sein un bébé. Autour d'elle, les drapeaux des différents pays vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale sont représentés.

Membre du Parti communiste depuis 1939, André Fougeron avait transformé, au cours du conflit, son atelier de Montrouge en imprimerie clandestine, participé au mouvement Résistance et dirigé le Front national des arts. Depuis la Libération, l'artiste, attaché au cabinet du directeur des Beaux-Arts, est chargé de l'épuration dans le domaine de la scène artistique et organise diverses expositions. Dans son dessin publié dans Ce Soir, il entend montrer que la reconstruction du pays, aussi bien politique qu'économique, s'appuiera sur les différents corps de la société. 

Ainsi, par son travail, l'ouvrier porte et élève la France. De son côté, le soldat entoure de ses bras Marianne pour la protéger. En lui faisant passer la main autour du cou du militaire, André Fougeron met bien en évidence le lien étroit qui unit le pays à son armée. Grâce à l'action des travailleurs et des militaires, Marianne peut donc prospérer et retrouver son image de mère nourricière.

Cette vision est en tous points conforme avec celle du PCF et s'inscrit dans les débats politiques du moment sur l'avenir du pays. Contrairement au souhait du général de Gaulle qui juge nécessaire la mise en place d'un exécutif fort, le Parti communiste, quant à lui, exige l'élection d'une assemblée constituante souveraine. Pour convaincre l'opinion du bien-fondé de son projet, le parti s'appuie sur la réunion, depuis le 10 juillet, des différents mouvements issus de la Résistance en « États généraux de la renaissance française », auquel le titre du supplément spécial de Ce Soir fait écho, mais aussi sur l'organisation d'une grande fête populaire et républicaine à l'occasion du 14-Juillet.

Depuis 1880, aux lendemains d'événements marquants, les gouvernements ainsi que les diverses forces politiques du pays ont utilisé la fête nationale pour fédérer la population autour des valeurs et des idées qui y sont associées : liberté, démocratie, révolution, union populaire, etc. Et l’on voit qu’au-delà d'une simple célébration, le 14-Juillet incarne aussi un moment de passage vers un supposé renouveau de la France, dont les dessinateurs de presse donnent leur interprétation en fonction de leurs opinions politiques.

Pour en savoir plus

AMALVI Christian, « Le 14 juillet. Du Dies irae à Jour de fête » dans NORA Pierre (dir.), Les Lieux de mémoire, tome 1 La République, Paris, Quarto Gallimard, 1997, BOIS Jean-Pierre, Histoire des 14 juillet, 1789-1919, Rennes, Éditions Ouest-France, 1991

SANSON Rosemonde, Le 14 juillet : fête et conscience nationale, 1789-1975, Paris, Flammarion, 1976

Mots-clés

dessins de presse14 juilletfête6 février 1934armisticePolitique
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Ecrit par

Aurélie Desperieres

Aurélie Desperieres est professeure d'histoire-géographie. Chercheuse, elle travaille notamment sur la caricature dans la presse aux XIXe et XXe siècles.

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