« Voici trois livres qui apparaissent dans la même semaine, sur le même artiste, Picasso, bien entendu. Aucun peintre de son vivant ne fut plus commenté que lui. [...] Mais Picasso étant un artiste exceptionnellement vivant mérite toute sa gloire vivante. »
Dans sa morphologie, cette rencontre avec Picasso rappelle celle des premiers formats de l'interview, apparue dans la presse française autour des années 1880 : sans se borner à un simple échange de questions et de réponses, le journaliste retranscrit d'abord longuement les circonstances de l'entretien, cite l'adresse de l'artiste - où les propos ont été recueillis (« rue de la Boétie »),
Tériades offre ainsi au lecteur un tour d'horizon de l'atelier sommaire de Picasso, où il se trouve en train de sculpter quand le critique d'art arrive pour l'interroger :
« Une succession de vastes pièces nues sans un meuble, sans une chaise avec leurs cheminées et leurs glaces traditionnelles, comme un appartement qu'on vient de louer et où on n'a posé à terre que des tableaux tournés contre les murs. En y réfléchissant bien, je crois me souvenir tout de même qu'il y a aussi une table. [...] Des vieilles bobines, du fil de fer, des ciseaux traînent sur le parquet et sur la cheminée. »
Pour aller plus loin : La Civilisation du Journal : histoire culturelle et littéraire de la presse française au XIXe siècle, sous la direction de Dominique Kalifa, Philippe Régnier, Marie-Eve Thérenty et Alain Vaillant. Nouveau Monde édition, 2011, p 1025 - 1040