Extrait du journal

— Grand Dieu ! est-ce possible? Mais attendez donc... Rappelez vos souvenirs, madame. Ne serait-ce point vous qui êtes venue, il y a douze ans, à l’hôtel Conti nental, à Paris, pourvoir mon mari ? — Oui, je venais le prier de taire nos anciennes relations, à cause de mon cher mari, à moi, — que j’ai perdu depuis — pour sauver mon honneur... — Le misérable a tenté de vous repren dre, de vous avoir de nouveau ? — C’est cela. Comment savez-vous? — J’étais là, dans une pièce voisine, j’ai tout entendu, et de là date la plus lugubre époque de ma vie. Savez-vous autre chose encore ? — Non. — C’est que l’admirable enfant qui m’a recueillie, qui m’a sauvée et qui souffre maintenant a déjà tenté de me sauver dans ces affreuses circonstances. Je vous don nerai tous les détails. — Un enfant ? mon Jacques, mon Henri ? — Un petit garçon qui était venu à l’hô tel, je ne sais comment. — Avec moi, madame, avec moi ; un petit marchand de violettes, que j’avais rencontré dans la cour de la gare SaintLazare et qui avait trouvé là un carnet aux initiales du comte... — C’était votre fils, je le vois mainte nant. — Ah ! le chéri ! le chéri ! Voilà donc pourquoi mon cœur était attiré si violem ment vers lui. Madame, voulez-vous me permettre de vous embrasser ? — Ah ! de grand cœur. Et les deux femmes, les deux comtesses d’Anouville se jetèrent dans les bras l’une...