Extrait du journal

boursiers se précipiteront sur les valeurs d’assurances pour les faire monter, et les épargnants qui perdent à tout coup conti nueront à épargner, afin que la prochaine révolution trouve d'abondantes moissons à confisquer. C'est trop bête ! Qu'est-ce qu'un bourgeois ? C'est un citoyen qui fait des économies. C'est un citoyen qui ne dépense pas au jour le jour tout ce qu'il gagne et qui accumule une ré serve avec l'intention de la léguer à ses en fants. C'est, somme toute, un homme qui se refuse des plaisirs immédiats, en vue d'un but plus lointain. Le bourgeois a donc la vertu de l'épar gne ; mais à force de la prôner il avait pres que tué les autres. Dans la vie civique, la conservation lui tenait lieu de tout : d'ambi tion, d'audace, de courage et d'opinion. C'est l'amour exclusif de l'argent qui a avili les classes qui se prétendaient dirigeantes et qui fait que la France n'a plus d'aristocratie, parce qu'on ne conduit pas une nation avec un idéal de grippe-sous. Le plus plaisant et le plus triste à la fois, c'est que les hommes pour qui l'argent est tout n'ont presque pas de dispositions pour les affaires d'argent. Que l'on compare les banquiers français et les banquiers anglais, les lois anglaises sur les sociétés anonymes et les lois françaises ;ur le même sujet, une publication financière française et une pu blication financière anglaise, une cote de Paris et une cote de Londres, une assemblée générale de Paris et une assemblée géné rale de Londres, le service des changes de M. Auriol et les services similaires de la Banque d'Angleterre, on devra se rendre compte d'une évidence criante : c'est qu'en matière monétaire ou financière nos bour- 1 geois sont des enfants, des enfants resquil leurs et âpres au gain, mais qui n'en sont pas moins toujours roulés. Ils adorent le veau d'or. Mais l'or est passé à Londres et le veau est en papier russe, en emprunts non payes, en valeurs des pieds humides. Cette bonne épargne...