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Journal de Montélimar, 14 octobre 1905

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Journal de Montélimar
14 octobre 1905


Extrait du journal

La violente campagne menée fort juste ment conhe les mouchards a eu comme résultat de faire rentrer dans leur tanière ces vils individus qui traînaient leurs pas à la poursuite de renseignements sur les opinions politiques et religieuses de meil leurs Français qu'eux. Mais de ce que cette catégorie de a mou chards » est terrée, il ne s'ensuit pas que l’œuvre réclamée par les André et les Combes ne se continue pas. Elle se poursuit sûrement dans le silen ce et dans l’ombre, aussi violente et aus si rageuse qu’auparavant, mais elle a pris une autre route. Au lieu de passer par l’antichambre du Grand-Orient, où elle pourrait encore heurter le veau d’or, dieu de la trahison, elle s’en va dans les préfectures féconder les dossiers occultes des hommes en vue. Il n’y a plus de délégués, a dit Itouvier ; nous voulons bien le croire puisque le mot a été supprimé de la langue gouver nementale, trais il reste des indicateurs. Et ces indicateurs tont toujours la mê me besogne ; tant que durera le régime, tant durera la chose. Pour vivre, la République, telle qu’elle est si faussement comprise, a besoin de s’appuyer sur de pareils éléments, et elle n’y manque pas. Sous l’Empire Romain, les délateurs étaient payés des sommes considérables ; pourquoi ? très probablement parce que le recrutement devait être fort dillicile; ou bien encore parce que les gens employés possédaient, à défaut de vertus, une intel ligence supérieure. A l’heure actuelle, il y a, dans notre pauvre France, une telle pléthore de poli ticiens aux abois, de gens à qui le bon Dieu semble avoir refusé un seul de ses dons, que le Gouvernement n’a qu’un geste à faire pour recruter toute une armée de propres à rien, de vils esclaves d’une triste Lesogne. Le geste procède du tiroir des fonds secrets. C’est le geste du voleur qui distribue au complice la part du butin. Le mépris que nous ressentons pour ces misérables qui vendent leurs concitoyens pour un morceau de pain n’a d’égal que le haut le cœur que nous lait éprouver une autre catégorie de mouchards. Nous voulons parler de l’homme qui espionne dans un but évidemment inté ressé, mais non politique. 11 y a de par le monde un tas d’indi vidus qui passent leur existence à fouiller celle dt s autres. Les administrations, petites et grandes, soutirent de ce mal enfanté par la jalousie et la haine. On ne leur demande rien à ces gens-là : c’est même le plus souvent contraint qu’on les écoute; ils continuent néanmoins leur fausse route. Us ne sont pas légion, c’est vrai, ceux qui s’en vont d’une porte à l’autre cueillir la moisson des histoires de famille pour la vendre au plus ollrant, mais on en ren contre. II y a encore, à côté de cette catégorielà, celle de ces crétins qui croient accom plir un haut fait en colportant de la rue à l’endroit qu’ils fréquentent des potins et des cancans vus à la loupe, et ce, dans le but souvent de plaire à qui n’a que faire de pareilles bassesses. Quel triste métier que celui de mou chard ! S’il restait à ce malheureux un atome de sens moral, croyez-vous que la honte ne lui rougirait pas le front chaque lois qu’il se sert de l’arme de la délation pour frapper un autre homme ? Le mouchard sait tout,quand il se trouve en présence de l’être qui le domine ou de qui il attend un service ; mais il ignore tout quand un égal ou un inférieur le questionne. Le mépris public poursuit pas à pas le mouchard. Il le sait ; mais il n’en conti nue pas moins son œuvre malfaisante. De quelle société fait-il partie ? De celle de l’être qui collabore à sa besogne, ou du niais qui la redoute ? Nous disons du niais, car, après tout, l’homme dont le passé comme le pré sent n’a rien à craindre de la langue d’un sot plane au-dessus d une malpro preté ; ou bien si la chose est nécessaire, il se met en face de son délateur, et lui fait rentrer ses propos dans la gorge, avec d’autant plus de facilité que neuf fois sur dix il a affaire à un lâche. Le mouchard, mais c’est le fat par excellence, car ne pas se connaître, et tout lire dans la vie des autres, c’est le comble de la suffisance. On a dit sur les ■ casseroles » des André et des Combes tout ce que la langue française a de cruel ; le sang qui coule dans les veines de tout bon citoyen s’est révolté à la publication des fiches ; on pourrait cependant trouver une circons tance atténuante a cette triste affaire, c’est que les hommes qui ont été honnis étaient pour la plupart des mercenaires, qui obéissaient à un ordre, tandis que le mouchard libre n’obéit qu’à ses mauvais instincts. . . . . A cette différence près, les deux espèces doivent se confondre et la réprobation doit suivre partout où elle la rencontre l’œuvre de la délation toute pétrie de bassesse et de lâcheté....

À propos

Fondé en 1858, Le Journal de Montélimar était un hebdomadaire publié dans la Drôme. Antisémite et collaborationniste, il fut supprimé à la Libération en 1944.

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