Extrait du journal

Inutiles si l'affaire ne doit pas changer de physionomie à l'audience, de trop amples déve loppements peuvent devenir dangereux dans le cas contraire, car ils créent des.irripressions qui, souvent, ne s'effaceront plus. Que devient, d'ail leurs, dans ces conditions, le principle de l'ora lité des débats, puisque, à chaque instant, et bien qu'il lui soit interdit de remettre aux jurés les dépositions écrites, le président, qui ne connaît que le dossier, les analyse ou les commente, si même il n'en lit pas des extraits dont il a pris note? Et n'est-ce pas, d'autre part, intervertir l'ordre des preuves, que de forcer l'accusé à s'expliquer sur des témoignages qui n'ont pas encore été produits devant les jurés, et qui peu vent être amoindris ou rétractés? C'est contre ces tendances que je vous invite à prémunir les présidents des assises, sans que d'ailleurs vos conseils touchent à leur indépen dance et revêtent le caractère d'un ordre qu'il n'appartient qu'à une loi nouvelle de leur don ner. Je né doute pas, du reste, que,ces magis trats aient toujours à coeur de résister à la ten tation de voir en l'accusé un adversaire qu'il importe de vaincre, et évitent de se complaire dans des développements exagérés qui, même lorsqu'ils s'inspirent d'une complète impartialité, sont inutiles pour la solution du : véritable débat oral et contradictoire. Ils ne verront dans l'inr terrogatoire ainsi < réduit qu'un moyen de faci liter aux jurés l'intelligence ,de l'affaire, d'en préciser les circonstances, de mettre l'accusé à même de se défendre librement, .sans le.presser . ni le troubler. Attentifs aux avis qu'avec votre •haute autorité vous-voudrez, bien leur donner en mon nom, ils s'efforceront, en un mot, de ne jamais s'exposer au reproche d'avoir fait un réquisitoire avant l'heure, ou d'être retombés dans le résumé que la loi du 9 juin 1881 a jus tement aboli. Le garde des sceaux actuel a ajouté : Vous aurez soin, d'autre part, de 11e désigner aucun président d'assises sans vous être assuré, au préalable, que le magistrat proposé réunit toutes les qualités de fermeté, de calme et de pondération nécessaires pour assurer, au mieux des intérêts de la société et de l'accusé lui-même, l'exercice de ces hautes fonctions. Nous savons trop la prudence de la très grande majorité des magistrats pour ne pas croire cette recommandation inutile, mais l'unanimité des circulaires belge et française montre la nécessité d'une, modification. Il serait regrettable qu'un projet aussi uti le que celui plusieurs fois déjà envisagé au Parlement,, ne soit examiné qu'à des inter valles éloignés, après qu'un procès scanda leux en a rappelé l'utilité, et retombe dans l'oubli, l'émotion passée. Faud'ra-t-il, cette fois encore, attendre un nouveau mouvement d'opinion pour que les projets raisonnables qui sont proposés puissent aboutir enfin ? Il serait regrettable ce jour-là que, dans un mouvement trop brusque, et sous prétexte d'urgence, 011 votât alors un texte hâtif qui risquerait de dépasser la mesure et de désar mer la répression. M. G....