Extrait du journal

Malheureusement, il est rave qu'on s'adresse à eux sur le ton qui semble avoir prévalu hier soir. Les revues pédagogiques primaires font de la surenchère révolutionnaire. Les institu teurs libéraux, sensés, attachés à leurs devoirs et aux traditions de leurs ainés, ne trouvent vraiment dans la presse spéciale aucun organe qui traduise leurs idées. Les revues, naguère citées pour leur modération ont renié tout leur passé. Gomment veut-on que le corps primaire conserve son sang-froid s'il 11e reçoit que des encouragements à en sortir? Cette semaine encore, M. Buisson publie dans le Manuel gé néral un grand article pour conseiller aux in stituteurs de réclamer le droit au Syndicat. Le Manuel général, qui date de trois, quarts de siècle, a joui longtemps d'une réputation de sagesse tellement bien établie que la di rection de M. Buisson n'est pas encore par venu à la lui faire perdre entièrement. C'est donc là qu'on pourrait s'attendre à voir les questions traitées avec mesure et pondération. Ce n'est plus le cas. Certes, M. Buisson ne s'ex prime pas comme M. Hervé. Sa manière est plus subtile et plus fuyante. Elle consiste sur tout à prêter aux instituteurs des vertus civi ques au-dessus de toute tentation. Elle consiste aussi à ignorer ou à vouloir ignorer toutes les manifestations qui dénotent un état d'esprit moins idyllique. Le procédé est commode et séduisant. Il faudrait aux lecteurs de M. Buis son une rare abnégation pour se juger moins admirables que leur portrait. C'est ainsi que M. Buisson se tire de la ques tion du Syndicat. Elle n'a plus rien d'épineux sous sa plume. Le Syndicat aura toutes les ver tus. Il imposera à ses membres, par la force de la persuasion, une « discipline volontaire ot collective », qui sera un objet d'envie pour les fonctionnaires non syndiqués. Les mandataires des Syndicats se garderont bien d'abuser de leur puissance. Ils ne feront rien « sans s'être assuré, plutôt dix fois qu'une, de leur bon droit ». Ce sera positivement l'âge d'or-. L'idée d'une grève leur paraîtra un sacrilège ; ils n'au-...