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Journal des débats politiques et littéraires, 11 janvier 1836

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Journal des débats politiques et littéraires
11 janvier 1836


Extrait du journal

Valenline, drame en deux actes, par MM. Scribe et Méiesvilie. Quel incroyable changement s'est opéré, seulement depuis dix ans, dans l'état physique, philosophique, politique et moral de la femme, comme on dit aujourd'hui! Autrefois, au temps de M. Scribe, je ne parie pas du temps de Molière, la femme était encore un être passablement heu reux et assez raisonnablement entouré de considération et respect. Nous étions, il est vrai, fort éloignés des beaux temps de la chevalerie, et même des belles manières du grand siècle'; mais enfin, à tout prendre, les femmes d'il y a dix ans n'avaient pas encore trop à se plaindre. Reines sous François ler,Ier, duchesses sous Louis XIV, marquises sous Louis XV, baronnes àla cour impériale de Napoléon, les femmes étaient encore, sous M. Scribe, de très riches bourgeoises, des femmes de notaires ou d'agens de change, estouréès de tout le luxe et de tout le bonheur possibles. Pendant dix belles années nous avons vu ces dames, s'abriter à l'envi dans les plus riches boudoirs, les plus ëlégans salons , les plus jolis petits jardins de la Ghaussée-d'Antin. Romanciers et poètes, c'était à qui prodiguerait à ces dames , aristocratie im provisée, les plus riches parures, les passions Jes plus élégantes; c'était à qui léur ferait épouser les plus aimables colonels. Ainsi, sur le théâtre comme dans le monde, chaque femme a en son jour de règne : celle-ci a régné dans les tournois, celle-là dans les cours, cette autre dans les camps, cette autre enfin dans son salon et dans son comptoir. Mais enfin chacune d'elles a régné à son tour quand son heure est venue, et je ne crois pas qu'à propos de ces dames nous nous soyons jamais, romanciers ou poètes, écartés en rien du proverbe qui dit : Paris est le paradis des femmes et l'enfer des chevaux. Depuis quelque temps, seulement, à en croire nos romanciers et nos faiseurs de drames et de comédies, l'enfer des chevaux est devenu aussi l'enfer des femmes. Dans les livres et sur le théâtre nous ne voyons plus que de pauvres femmes languissantes, mourantes, éperdues, accablées sous un joug de fer, et finissant toujours par succomber aux malheurs de leurs destinées. On dirait, à les entendre se plaindre et gémir, à voir leurs mains se tordre, et leur taille se courber, que toutes ces scènes d'horreur se passent chez quelques unes de ces tribus sauvages où les femmes remplissent à peu près le métier de bêtes de somme. 0 les mal heureuses! on les plonge dans la soie, on les habille de velours, lepr cou de cygne est chargé de perles, le diamant brille à leurs oreilles, For ruisselle entre leurs mains; pour elles, on bâtit des palais de marbre et d'or; on charge les plafonds de peintures, on entasse dans des serres • les fleurs les plus odorantes de l'hiver et du printemps ; oa va chercher !...

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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