Extrait du journal

PARIS, il SEPTEMBRE. C'est aujourd'hui l'Espagne qui reconnaît le gouvernement de la défense nationale de la France, établi à Paris à la suite de la révolution du 4 septembre. On trouvera plus loin la lettre dans laquelle M. Olozaga annonce qu'il vient d'être autorisé à entrer immédiatement en rapports officiels avec notre ministre des affaires étrangères, et la réponse faite par M. Jules Favre à cette communication. Nous manquons encore aujourd'hui de renseignemens précis sur l'explosion de la citadelle de Laon. Faut-il croire que, comme l'ont prétendu divers journaux, le général qui commandait dans cette ville n'a fait sauter la citadelle qu'après s'être engagé à la rendre? Nous ne pouvons le supposer, d'abord parce qu'un tel acte, quelque héroïque qu'il puisse paraître, serait en réalité un "acte condamné par les lois de la guerre ; puis, parce que, d'après tous les récits que nous avons pu re cueillir jusqu'ici , des soldats français ont péri dans cette catastrophe, et comme l'usage est que les forces ennemies aux quelles on rend une place n'y entrent qu'après que ses défenseurs l'ont évacuée, nous sommes portés à admettre la ver sion d'après laquelle le général qui com mandait à Laon a tout simplement ou vert les portes de la citadelle, sans pren dre pi par écrit ni verbalement l'enga gement de la remettre à l'ennemi, cé qui lui laissait toute liberté d'action, En tous cas, soit qu'il faille voir là un fait de guerre licite, soit qu'il faille se résigner à admettre qu'un général français a pu, dans un accès de désespoir patriotique, manquer à des lois qu'il aurait dû respecter, le tragique événement qui a causé hier une si profonde impression dans Paris prouve que les pas sions, surexcitées par la guerre implacable qui nous est faite, s'exaltent chaque jour de plus en plus, et nous devons constater que l'immense majorité des Parisiens, se préoccupant assez peu de la valeur morale et légale de ce sanglant exploit, semble accorder une admiration sans restriction et sans réserve aux soldats intrépides qui se sont ensevelis sous les débris de la forte resse dont la défense leur avait été confiée....