Extrait du journal

pris un timbre nouveau qui donnait aux chose's simples, qu'elle disait une portée, nouvelle. Ou commençait à tenir compte dé la petite pensionnaire. M. Roque, l'un des oracles du cercle Rémonville, avait dit dogmatiquement à propos d'elle : La beauté qui attache le plus est celle qu'il faut d'abord chercher, et qui ne, s'impose qu'après l'estime du caractère. Elle jouait du piano avec âme désormais, ' sinon avec beaucoup de talent. Il fallaitêtre aussi complètement absorbé ailleurs que l'était Amaury pour ne pas la trouver aimable, et les craintes mêmes de- Perle, son aversion à peine déguisée auraient dû faire comprendre à MllB Fréhel que la lûtte entre elles était devenue possible. Mais la pauvre Yvonne ne songeait pas à lut ter; sa métamorphose s'était accomplie sans qu'elle en eût conscience; elle ne haïssait, elle ne blâmait personne ; son re gard, quand il s'arrêtait sur Perle, n'ex primait que de la tristesse et une curio sité sans mélange de colère. Combien sa rivale différait du modèle féminin qu'au couvent on lui avait toujours proposé, le seul, lui disait-on, qui pût gagner l'affec tion d'un honnête homme ! Et cepen dant il lui semblait tout simple qu'on l'aimât. Au milieu de l'été, elle prit prétexte d'une fête de la Vierge pour aller faire une retraite chez les religieuses qui l'avaient élevée. Son recueillement édifia toute la communauté. Ce fut pendant cette retraite que, rentrée le soir dans sa cellule, elle transcrivit sur son album ce passage d'un auteur ascétique dont la su périeure avait mis les œuvres à sa dispo sition : « La preuve que notre cœur n'est fait » que pour Dieu, c'est que nul n'est digne » de cet amour infini, exclusif, que pour » tant chacun porte en lui-même. Il est » logique de conclure que ce que tout » homme possède et ce que nul homme » ne mérite n'appartient qu'à Dieu. » Elle relisait souvent ces mots tracés en tremblant par sa plume, et, la retraité...