Extrait du journal

Mais d'abord il faut tâcher d'avoir la mesure du danger. Le Trésor est-il menacé d'une saignée pa reille à celle de 1852, où la sortmie sortie du Tré sor pour payer le drawback sur le sucre monta à 20 millions, dont un tiers peut-être, sinon une plus forte part, était en sus de ce que le Trésor avait effectivement reçu? Suivant M. Larréguy, ce serait possible, ce serait même probable. D'après son calcul, dans l'état présent des choses, sur 100 kilogr. de sucre raffiné qui sortent, le Trésor perd net 44 fr. Ce calcul suppose deux choses : la première, que tout le sucre raffiné qui est réexporté soit étranger et soumis à ce titre au droit le plus élevé; en fait, les choses se passent comme si cette supposition était parfaitement exacte, car d'a près la législation il suffit de présenter, à la sortie du sucre, des quittances de douanes sur le sucre étranger pour--en obtenir le remboursement. La 101 n'exige pas, et dans notre opinion elle ne peut exiger qu'on justifie de l'origine, ni que la per sonne qui exporte le raffiné soit la même qui a importé lè brut, ni que le lieu de l'exportation ait aucun rapport avec le port d'importation. Les quittances du Havre sont valables à Marseille, et réciproquement; il s'en fait commerce très ostensiblement, très légalement. Jusque-là donc le calcul de M. Larréguy est juste; mais il repose sur nne autre hypothèse, à savoir qu'en tenant compte de la valeur des bas produits, le brut rend 95 de raffiné. Il s'en . faut que les sucres bruts aient tous un rendement aussi élevé. Mais pour les opérations sur les sucres ce sont ces hautes qualités qu'on recherche pour de bonnes rai sons , et on peut les trouver parce qu'elles ne sont pas rares. Reste donc que sur ce second point le calcul de M. Larréguy est fondé jusqu'à un cer tain degré, et qu'il deviendrait exact, même pour une exportation extrêmement large, si au chiffre de 44 fr. on substituait celui de 50 à 55 fr. Il s'en suit que, pour une exportation de 20 millions de kilogrammes de raffiné, la perte du Trésor pour rait être de 6 à 7 millions. La somme mérite qu'on y regarde. En 1855 déjà, l'exportation a assez approché de la quantité de 20 millions de kilogrammes pour que désormais elle l'atteigne et la dépasse. Elle est mon tée à 18 millions de kilogrammes en!Bss. D'après l'exportation des quatre premiers mois de 185 i, telle qu'elle vient d'être consignée au Moniteur, elle irait à 22 millions pour l'année courante. Que sera-ce donc à partir du 16 août? La raffinerie est puissamment aiguillonnée à cet effet. Elle va jouir en Angleterre d'un avantage très marqué. Pour le il suffit de se rappeler que le raffineur français qui exporte du sucre reçoit une prime nette que M. Larréguy porte à 44 fr., et qui atteint rarement ce taux, mais qu'en moyenne on peut estimer à près de 55 fr. Ainsi le raffineur établi au Havre ou à Dunkerque aura sur le raffi neur britannique, à Londres, tous frais de trans port prélevés, un avantage de 50 fr., et même de près de 40 fr. dans le cas où il aura soumis au raffinage les bonnes qualités de là Havane et autres lieux. Donc l'exportation des raffinés de France en Angleterre ne peut manquer de s'ac croître, et on sait combien est vaste le débou ché du marché anglais : il s'y déverse maintenant 400 millions de kilogr. de sucra brut. Aussi M. Larréguy annonce-t-il que « toutes les tè » tes de nos rafûneurs sont en ébullition de - » vant la perspective que va leur offrir le marché » anglais. Et, ajoute-t-il, a-t-on vu s'élever en » France des raffineries étrangères sur une grande » échelle; chacun veut avoir sa part du. gros lot...