Extrait du journal

Le drainage est un remède à peu près infaillible a ces divers inconvéniens. Avec le drainage, plus de terrain perdu pour la culture; plus de sillons, plus de ces raies stériles et nues qui rendent à peine la semence qu'on y a jetée. Toutes les par ties du sol sont ensemencées uniformément, et, comme le dit un agronome anglais, les champs présentent l'aspect de jardins revêtus partout d'une végétation également luxuriante. Il est parfaite ment établi que le drainage exerce une influence bienfaisante sur la salubrité du climat, sur la santé des hommes et des animaux. Les expériences faites en Angleterre et en Ecosse attestent que les brouil lards et toutes les maladies qu'ils engendrent, les fièvres, les rhumatismes, tes dyssenteries et cer taines épizooties ont disparu dans les contrées où le drainage a été pratiqué sur une "grande échelle. Le résultat financier du drainage est peut-être, de toutes les questions que l'on peut soulever en cette matière, la plus difficile à trancher d'une manière absolue., Oa admet communément que le prix de revient pour lés. travaux de drainage est en général de 200 fr. à 250 fr. par hectare; mais il peut varier de 100'fr. à 1,600 fr. dans les cir constances exceptionnelles. Quant au bénéfice que peut donner l'opération, il est plus difficile de le déterminer, d'abord parce que, pour l'apprécier complètement, il faudrait tenir compte de tous les avantages accessoires que procure le drai nage, tels que les facilités qu'il donne à la culture, la valeur du terrain gagné par la suppression des fos sés, l'économie qu'il permet de faire sur les engrais et sur le nombre des animaux employés dans les at telages ; ensuite parce que, même à ne considérer que le bénéfice direct de l'opération, c'est-à-dire l'accroissement des récoltes, il varie suivant une foule de circonstances très diverses, parmi les quelles il faut mettre en première ligne la nature du sol, la nature des matériaux employés à la construction des drains, l'exécution plus ou moins habile et régulière des travaux. Quelque fois la récolle de la première année suffit pour couvrir les frais do l'opération; d'autres fois, il faut la récolte de trois ou quatre ans. M. Barrai, qui a recueilli sur ce point une masse d'observations très intéressantes, estime au delà de 20 pour 100 le revenu des sommes dépensées dans les travaux de ce genre; mais il restreint ce chiffre aux opé rations faites dans de bonnes conditions et sur des terres naturellement riches, et il ne promet qu'un intérêt beaucoup plus faible, 7 ou 8 pour, 100, quand les travaux sont faits sur des terres àe moindre qualité. On ne peut mieux faire ici que de citer le témoignage d'un homme très compétent, M. Decauvilie, agriculteur distin gué de la Brie. « Dans les années humides, dit M. Decauvilie, ta récolte peut être doublée dans certains sols, tandis que dans les années saines l'augmentation de rendement peut n'être qu'insi gnifiante. La nature du sol vient encore modifier les résultats du drainage. Il y a des sols où le des sèchement est immédiat, tandis que dans d'autres il faut plusieurs années pour qu'il se produise d'une manière complète. On comprend facilement que, dans le premier cas, on est déjà rentré dans ses avances, alors que dans le second on n'a encore profité d'aucune améboration sensible. Durant les deux premières .années qui ont suivi mes assainissemens, mes récoltes n'ont pas été augmen tées. Cependant,-dans la ferme que j'exploite, presque partout le dessèchement a été immédiat. C'est que ces deux années ayant été sèches, les ré coltes n'onl pas assez souffert dans les terres non assainies pour que la différence fût appréciable. Mais j'estime qu'en 1853 il faut porter à 23 pour 100 l'augmentation que m'a procuré le drainage. Mes blés ont beaucoup moins versé qu'ailleurs ; le grain a plus de qualité et pèse de 2 à 3 kilogr. de plus par hectolitre que le grain venu sur les ter rains de même nature non drainés. Mon produit à l'hectolitre est 'en poids celui d'un.e année moyenne. Dans certaines parties , ma récolte de pommes de terre a été doublée, ainsi que celle des fourrages. Mais je crois qu'il arrivera rarement une année où l'augmentation delà récolte due au drai nage soit aussi considérable qu'en 1855. » Ainsi le drainage peut ne pas donner de résultat immédiat; mais il est très rare que le résultat soit nul et l'opération manquée totalement. Cepen dant, pour se mettre en garde contre de pareils mécomptes, il est essentiel d'observer scrupuleuse ment toutes les règles qui constituent îa théorie du drainage. Les prescriptions sur la profondeur et l'espacement des tranchées souterraines, sur la pente et la direction qu'il convient de leur donner, sur les dimensions des tuyaux qui servi ront à les garnir, ne peuvent pas être négligées impunément. MM. Barrai et Leclerc, qui sont les...