Extrait du journal

|; vapeurs; dans cette incertitude effrayante où la destinée entière d'un galant homme peut succom ber, il arrive le plus souvent que de beaux es prits très ingénieux et très populaires ne songent guère à se hasarder sur ce mauvais lac tout rempli de caprices et de naufrages, et, contens d'unedoire àla fois moins éclatante et plus sûre, ils s'eUdient heu reux de faire dp leur comédie un proverbe à lire, et de leur drame un conte, et de leur esprit la menue et cou rante monnaie du bel esprit qui se dépense au jour le jour, chaque matin apportant son tribut d'imagina tion çt de style à l'oisiveté de chaque soir ! C'est pour quoi M. Amédée Achard , avec les charmantes qualités du poète comique, devait hésiter si longtemps! lia hé sité longtemps, il a bien fait, ça lui a fait produire un grand nombre de ces pages heureuses dont se sou vient le lecteur. Il n'hésite plus, il fait bien encore; il trouvera, je l'espère et j'en suis sûr, dans cette forme nouvelle donnée à son talent, un agréable emploi de foutes les bonnes choses qu'il prodigue à tout venant, si malheureusement, hélas ! avec tant d'imprévoyance et de sans-gêne, que jusqu'à la fin, jusqu'au moment où l'artiste fatigué se voit forcé de crier grâce et merci, c'est toujours à recommencer. Ce petit acte, intitulé les Souvenirs de Voyage (on voit ici un homme qui se plait au bon français), se ressent tout à fait de la bonne humeur de tant de jolis contes signés du nom de M. AmédéeAchard. Au mo ment heureux où la Restauration donnait à la France un peu de repos, de liberté et de bonheùr, à l'instant où toutes choses cherchaient et retrouvaient leur place naturelle, il y avait à la cour de ce roi égoïste, habile et prévoyant, Louis XVIII, un compagnon de sa jeunesse et de son exil, un certain marquis de La Vieuville, un proche parent de M. le marquis de La Seiglière! Il était, ce marquis de La Vieuville, bon homme à ses heures, content lorsqu'il se portait bien, et parfaite ment heureux si quelque parfum de la jeunesse en .volée et du mois de juin d'autrefois montait par ha jsard à son cerveau doucement réjoui. Du reste, il avait ;été tout ce que pouvait être un bon gentilhomme avant les heures mauvaises, avant les heures terribles : il avait été brave, çl avait été jeune, il avait beaucoup joué et beaucoup aimé, il avait fait de grandes dettes et même il les avait payées. 11 était vraiment un homme original, M. le marquis de La Vieuville! Pour cét homme-là chaque jour de la vie avait à peine entendu ; sonner deux ou trois heures, tant les heures lui étaient légères! Une année, à ses yeux, représentait à peine...