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Journal des débats politiques et littéraires, 22 août 1844

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Journal des débats politiques et littéraires
22 août 1844


Extrait du journal

PARIS, 21 AOUT. Les nouvelles de la côte d'Afrique sont attendues en France avec une impatience que nous comprenons et que nous partageons. Mais enfin, si le gouvernement n'en a pas reçu, on ne peut raisonnablement exiger de lui qu'il en invente, et toutes les sommations des jour naux de l'Opposition n'auront pas le pouvoir d'accélé rer le télégraphe. Nous croyons être en mesure d'affir mer que le gouvernement ne sait rien de plus que ce qui a été porté à la connaissance du public. M. le prince de Joinville, aussitôt après le bombarde ment et la destruction des ouvrages avancés de Tanger, est rentré àCadix pouryréparer quelques avaries de la flotte, et il en est reparti le 8 août, se dirigeant sur Mogador. En comptant le temps qu'il a fallu pour se rendre devant cette ville, celui qu'il faut pour en re venir et pour que les dépêches parviennent en France, on verra que le gouvernement ne peut encore attendre des nouvelles de l'escadre française avant trois ou quatre jours, et qu'il ne doit être en aucune façon respon sable de toutes les fluctuations que subissent et les fonds publics et l'opinion publique. Ce n'est pas seulement en France que se manifeste cette anxiété ; elle est beaucoup plus grande encore, s'il est possible , en Angleterre. La presse anglaise se montre encore plus préoccupée que la presse française des suites du bombardement de Tanger, et elle témoi gne ses inquiétudes d'une manière qui lui fait, nous de vons le dire, très peu d'honneur. Le gouvernement fran çais a exprimé formellement et publiquement sa réso lution de ne faire qu'une guerre défensive ; il a dé claré à plusieurs reprises qu'il n'avait pas l'intention d'ajouter un pouce de territoire à ses possessions d'A frique. Et c'est en présence de ces déclarations réité rées que les journaux anglais se donnent la peine de protester contre toute occupation permanente du Maroc par la France ! Nous l'avons déjà dit, et nous le répé tons , cela s'appelle faire du courage et de la fermeté à très bon marché. On a fort mauvaise grâce à imposer à la France des bornes qu'elle s'est tracées à l'avance très volontairement, et sans la permission de per sonne. Le gouvernement français ne veut pas pren dre le Maroc, mais il veut garder l'Algérie. Il peut convenir à la presse anglaise de déprécier ce qui se fait dans l'Afrique française, de dire que nous y per dons notre temps, nos hommes, et notre argent. Gela peut être; mais, dans tous les cas, cela ne regarde que nous, et nous sommes fort peu sensibles à cet intérêt que l'on veut bien témoigner pour nos finances. Nous ne savons pas ce que l'Angleterre aurait fait de l'Al gérie , si elle l'avait eue ; mais nous l'avons, et nous dépenserons, s'il le faut, des millions de francs et des milliers d'hommes pour la garder. Nous conjurons la presse anglaise de veiller davantage sur elle-même, car elle joue, dans toute cette affaire, un rôle peu digne d'elle, peu digne du grand pays dont elle représente l'opinion. Elle fait d'une question particulière et accidentelle une question générale ; elle nous menace d'une coalition; elle fait appel aux passions de 1815, et se vante de l'appui de la Russie, de l'Autriche et de la Prusse. Il y a peu d'honneur à menacer ainsi avec l'épée des autres. L'Angleterre, si elle acceptait la responsabilité d'un pareil langage, se donnerait à elle-même un grand démenti. Elle a salué, avec un enthousiasme dont, malgré tout, nous n'avons pas perdu le souvenir, la révolution de 1830, parce qu'elle y a vu le triomphe des principes constitutionnels et la victoire des libertés légales. C'est grâce à l'union des deux grandes nations libérales de l'occident, que la Belgique apu fonder sa nationalité, que le Portugal et l'Espa gne ont pu se donner un gouvernement parlementaire. L'Angleterre serait-elle donc disposée à répudier cette solidarité glorieuse, et à renier la cause de la civilisa-...

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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