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Journal des débats politiques et littéraires, 22 novembre 1833

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Journal des débats politiques et littéraires
22 novembre 1833


Extrait du journal

Qu'avez-vous besoin d'en savoir davantage ? Ne le réélisez pas. Il y a ,fil est vrai, une réflexion qui rassure les gens quand on leur parle du danger de décourager les fonctionnaires publics. On en trouvera toujours! Oh! pour cela c'est certain. Si vous ne voulez que remplir des places vides, de quelque manière que ce soit, vous ne serez jamais embarrassé. Réduisez tous les traitemens à moitié, au tiers ; excluez les fonctionnaires de la Chambre, humi liez-les de toutes les façons, et soyez tranquilles! les compétiteurs ne vous manqueront pas. Mais reste à savoir quels compétiteurs ! L'Etat sera servi, mais il le sera plus mal que qui que ce soit dans le pays. II y aura de bons médecins pour ceux qui veulent un bon médecin, des avocats habiles pour ceux qui veulent un avocat ha bile ; l'Etat aura le rebut de la société. Quand on ne sera bon rien, on sera toujours assez bon pour l'Etat. Electeurs ! gardez-vous bien de réélire un député fonctionnaire public ! Ne voyez-vous pas que ce serait faire trop d'honneur à ceux qui vous servent, qui dé fendent vos intérêts et vos lois dans l'administration et dans la ma gistrature ? Mais au moins, ce que l'administration perdrait à l'exclusion des fonctionnaires publics de la Chambre, la liberté le gagnerait-elle? On ne demande rien moins aux électeurs que de provoquer, par des exclusions systématiques, l'abolition de la loi la plus libérale peut-être qui ait été faite depuis trois ans. Interdisez aux électeurs de choisir pour leur député un fonctionnaire public, assurément vous n'augmentez pas leur liberté, vous la restreignez. Que crai gnez-vous? Qu'un député ne se laisse séduire par l'appât d'une place, n'est-il pas vrai, et ne trahisse le mandat qu'il a reçu? Forcez-le, au moment où il accepte des fonctions salariées qu'il n'avait pas avant son élection , à sortir de la Chambre pour venir de nouveau subir le jugement des électeurs! Le danger disparaît, ou il n'existe que dans la complicité des électeurs, et il serait ab surde, illibéral au plus haut degré de supposer la complicité des électeurs. Le gouvernement voit ses choix soumis à la critique du pays. Ce n'est plus seulement le député que les électeurs ont à juger, c'est le fonctionnaire public. On a déjà dit cela vingt fois ; mais ce qu'il faut ajouter, c'est que l'avantage du gouvernement représentatif consiste précisément â faire sortir, par l'élection, de l'obscurité de leurs provinces des hommes de mérite qui peut-être y seraient restés ensevelis. Le gouvernement est trop loin d'eux. L'estime de leurs concitoyens qui les voient, qui ont vécu avec eux, qui n'ont trouvé personne de plus digne de les représenter â Paris les désigne au choix du gouvernement, et après avoir préparé ce choix, les électeurs sont encore appelés à le ratifier ou â le casser en quelque sorte. Cela n'est-il pas mille fois plus libéral qu'une ex clusion absurde ? Mais la Chambre sera remplie de fonctionnaires! Ajoutez: si les électeurs le veulent bien. Mais les fonctionnaires publics ne sont pas indépendans! Un député qui, avant d'être fonctionnaire, pen sait comme le ministère et votait avec la majorité, ne ment pas àsa conscience en acceptant des fonctions publiques. Celui-là seul qui, pour une place, passerait de l'Opposition dans la majorité, trahi rait sa conscience. C'est aux électeurs à en faire justice. Mais vous voyez bien que , depuis quelque temps, les électeurs ont renommé tous les députés promus à des fonctions publiques ! Qu'est-ce que cela prouve? Que vous êtes dans l'Opposition, et que les électeurs n'y sont pas. Ce n'est pas la loi qu'il faut changer, c'est la majorité. Agissez sur l'esprit des électeurs, amenez-les à vous, ils useront de leur droit pour ne pas renommer les députés fonctionnaires, comme ils "en usent aujourd'hui pour les renommer. Mais vouloir leur in terdire ces choix de vive force, leur faire honte de ce qu'ils votent selon leur conscience, c'est aussi trop laisser voir qu'on n'attend rien d'eux par la persuasion. Et voilà le grand mystère! On trouve à se plaindre de tout, parce qu'on a tout contre soi, députés, élec teurs, la liberté même! Le remède à cela? Le remède, ce serait...

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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