Extrait du journal

Mais son exemple n'est pas banal non plus, et le livre où elle a relaté ses impressions et ses aventures ne l'est pas davantage. Tout d'abord, en les notant au jour le jour, elle ne songeait guère à les publier ; c'est pour son plaisir qu'elle noir cissait ces pages, pour se souvenir plus tard des fortes émotions ressenties en cours de route et les revivre par la pensée. Dans une courte, et touchante préface, S. A. il la Duchesse d'Aoste dit comment elle fut amenée à confier à un éditeur son manuscrit et le soin de publier ces Voyages en Afrique : « Mes enfants ont vu ces notes< écrit-elle ; ils me' dirent : « Mère, faites-nous en un livre, avec « des gravures que nous puissions regarder et « lire et relire ; nous le conserverons comme une « chose chère à nos cœurs ; nous y apprendrons « les noms des pays mystérieux que vous avez o; connus ; lorsque nous serons grands, à notre a tour,' nous irons là-bas. », Quelle mère pourrait résister au désir gentiment exprimé par ses enfants ? Et celui-là était si fiatteusement formulé !... Il est heureux que la princesse l'ait exaucé, car son livre est bien des plus vivants, des plus attrayants, des plus poi gnants, parfois, que l'on puisse lire. Il exalte et réconforte ; il communique le goût des voyages lointains et des périlleuses aventures; il glorifie le courage et le sang-froid; il fait aimer la bravoure et le danger; il amuse et il instruit. Il 6e lit comme, un roman de Jules Verne, mais il intéresse et il émeut davantage, parce que, dans les récits de ce genre, la réalité plaît tou jours mieux t captive plus fortement que la fic tion,.» ingénieuse soit-elle. v*-'; **" ' On puise, dans un tel livre, les nobles senti ments qui soutiennent les grands chercheurs d'aven tures, les coureurs de la brousse et les pionniers des vastes forêts tropicales : a La religion de la beauté, du courage, de la témérité, le culte, enfin, de la nature, vierge, qui élève l'âme, ia puri&e et la transporte, dégagée de tout lien vulgaire, sur les ailes de la liberté, vers Dieu, créateur de toutes choses, en un hymne d'adora tion infinie. » Fréquemment, ces pensées reviennent sous la plume de la voyageuse : a Je jouis profondément de cette vie saine,. sans - secousse ; les jouis succèdent aux jours, calmes, sereins ; c'est ici qu'il faut venir pour retrouver l'équilibre physique et moral que la vie d'Europe, agitée et étriquée, fait perdre parfois ; de l'air, toujours de l'air, n'est-ce pas la grande hygiène ? Nous sommes dehors quinze heures par jour, et, la nuit, la brise circule dans nos tentes. » Ainsi, partie pour l'Afrique dans l'espoir d'y recouvrer la santé, l'auguste voyageuse ne pou vait plus, désormais, rester longtemps éloignée des vastes espaces qu'il lui avait été donné de par courir.• Chaque ' hiver, elle voulait repartir pour une nouvelle contrée du Continent noir. A peine ve nait-elle de revoir les épreuves de ses Voyages en Afrique, et d'indiquer "'emplacement des cinq cents gravures et clichés qui illustrent cet ouvrage, qu'elle e'embarquait de nouveau, avant même que le volume eût paru. Il, lui fallait entendre « les voix de la forêt prochaine, la brise dans les arbres, les bruits lointains qui emplissent le cœur de paix et d'har monie v. Elle (tait impatiente de se mesurer avec les grands fauves — lions, buffles, éléphants, et autres habitants de la brousse — dont les dépouilles innombrables attestaient, à chacun de ses retours, son adresse, son sang-froid et son intrépidité. Ce sont là vertus dont la princesse Hélène de France sut donner maintes fois la preuve et l'exemple, comme le fit si souvent son auguste frère, quand l'occasion leur était offerte de courir un risque et de braver un péril......