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La Cocarde, 23 décembre 1901

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La Cocarde
23 décembre 1901


Extrait du journal

Refus de juger Les magistrats doivent prononcer sur les litiges qui leur sont soumis en pre nant la raison pour guide et la justice pour but. Malheureusement cette mis sion est, la plupart du temps, dévolue à des juges autoritaires qui substituent leur propre volonté à la loi. Personne n’est chargé de la surveillance de ces déséquilibrés et on leur laisse accomplir leur mauvaise besogne. C’est un danger, et un grand, de l’inamovibilité. Veut-on un exemple de ce que peut un juge en fonctions et des abus qu’il peut commettre? Voici le cas : A la suite de l’Exposition universelle de 1900, un procès a été intenté par un nommé Moatti à un sieur Remy. Le premier étant sous-locataire du ffcopd d’un emplacement à l’Exposition pour toute la durée de celle-ci, s’est trouvé expulsé six semaines environ avant la fermeture. Cependant, il avait payé son loyer, s’était conformé stric tement aux conditions qui lui avaient été imposées par son cédant Remy. Cette expulsion étant consommée, Moatti avait fait constater par huissier qu’il restait dans les magasins d’où on le forçait à partir des pâtisseries, des conserves, des bonbons, etc., et qu’ayant payé le loyer jusqu’à la fin de l’Expo sition il lui était dû un dédommage ment. Il fit donc assigner Remy devant le tribunal de la Seine en restitution du loyer par lui payé et en paiement de dommages-intérêts. L’affaire suivit son cours avec une sage lenteur, comme d’habitude. Puis, au bout d’un an, Remy. par son avoué, se décida à conclure, il opposa l'incompétence du tribunal civil pré tendant que ce dernier ne pouvait con naître de la cause. Moatti répondit que, s’agissant de loyer, c’était le tribunal civil qui de vait statuer. L’affaire était donc en état, elle pou vait, elle devait être jugée. Mais bien qu’il y eut deux avoués en cause dont le ministère était obliga toire, le président exigea aussi deux avocats. Moatti répondit qu’il ne voulait pas faire présenter un avocat, que le litige était peu important, que les frais irrépétibles qu’il avait à faire dépasse raient l’importance des dommages-in térêts qui pouvaient lui être alloués et il pria le tribunal de juger sur pièces. C’était là un langage respectueux, c’était une marque de confiance envers les juges, puisque lq demandeur s’en rapportait a leur sagesse et les laissait libre de juger dans un sens ou dans l’autre. Cette attitude déplut nu président qui déclara que l’affaire pe seyait pas jugée W qu'up avocat ne se présenterait pas pour le demandeur. L’affaire en est là, Le plaideur demande justice. Le tribunal ne veut pas prononcer. C’est ainsi qu’en France la loi est obéie. C’est à Paris, foyer du progrès, pays de la lumière, qu’on refuse de rendre un jugement sous le prétexte que l’une des parties n’a pas chargé un avocat. N’est-ce pas navrant ? Aucune loi n’oblige un plaideur à se payer le luxe d’un avocat, il suffit flH’ua avoué fasse la procédure et lai flatte en état....

À propos

Lancée en 1888 par Georges de Labruyère, La Cocarde fut longtemps un titre dévoué corps et âme au mouvement boulangiste. Après l'écroulement de celui-ci, le périodique renforce sa ligne démocrate-chrétienne tout en rencontrant de plus en plus de difficultés financières. Plusieurs directeurs s'y succèdent, dont Maurice Barrès, mais aucun ne réussit à ranimer le périodique. Il continue toutefois sa parution jusqu'en 1938 avec un tirage extrêmement confidentiel – estimé à quelque 25 exemplaires par numéro.

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