Extrait du journal

Totalitarisme et Impérialisme Le baromètre est souvent instable, même et quand il s'agit de poli tique extérieure. Tout le monde s'accordait à penser que le < tour d’amitié > de M. Yvon Delbos prenait une assez bonne tournure, au moins par l'accueil qui lui avait été réservé en Pologne et en Roumanie, et s'en montrait satisfait, quand, brusquement, de fâcheuses nouvelles surgirent. L'annonce du retrait de l’Italie de la Société des Nations, au lende main du passage à Rome de M. Stoyadinovitch, ne laissera pas que de surprendre grandement les chancelleries, qui étaient loin de s attendre à cette nouvelle. Nous saurons ce soir, après le Grand Conseil fasciste, si elle ne constitue qu'un ballon d’essai, ou s il faut la considérer comme définitive. Que faut-il voir dans cette décision de l'Italie qui. annonce-t-or. par ailleurs, serait complétée par le retrait de son adhésion à la politique de non-intervention en Espagne ? Bien des bruits circulent à cet égard, qui sont autres que celui mis en avant du mécontentement italien en ce qui concerne la non-reconnaissance par toutes les grandes puissances et la S. D. N. de l'Empire éthiopien. A nouveau, dit-on, M. Mussolini changerait son fusil d'épaule et, n'ayant plus confiance dans un rapprochement avec l'Angleterre, il voudrait consolider l'axe Btrlin-Romc-Tokio, et surtout parer au danger du retour possible de l'Allemagne à Genève, qui est, à n'en pas douter, l'objet des sollicitations de l'axe Londres-Paris. Ainsi, le brillant second se trouverait dans l'impossibilité pratique de venir reprendre sa place à la table de la S. D. N. Cette explication parait assez plausible, encore que. à la vérité, il faut bien convenir que, pratiquement, l’Italie ne faisait déjà plus partie, depuis plus de deux ans, de la Société des Nations et du Bureau Inter national du Travail. Avec l'Allemagne et le Japon, et peut-être le Brésil, elle constituera donc demain, dans le monde, le bloc totalitaire, opposé au bloc de la S. D. N. Il faut savoir prendre son parti des choses qu'on ne peut décemment éviter, mais on avouera que c'est une nouvelle désillusion ajoutée à tant d'autres. ' Pendant que ce nouvel imbroglio se noue, la situation s'aggrave en Chine, où on annonce la prise imminente de Nankin par les Japonais, si ce n'est déjà fait quand ces lignes paraîtront. Tokio refuserait, affirme-t-on, de négocier avec Tchang-Kaï-Chek, et exigerait qu’il $e démit de ses fonctions. — Il wè naturel de-penser qticr les* choses n'iront pas si facilement, c que, malgré l’avance des Japonais, la conquête de la Chine du Nord n’est pas encore un fait accompli. Mais il va de soi que la situation devient de plus en plus inquiétante, et que les grandes démocraties occidentales, y compris l'Amérique, et peut-être davantage la Russie, devront finir par prendre garde à la mainmise du Japon sur l’Empire du milieu. Si attachés que nous soyons à la paix, on admettra bien qu’il est impossible d'assister à ce fait capital en spectateur impassible et indif férent. L'expansion impérialiste du Japon peut être grosse de consé quences pour la paix mondiale. Le tout est de savoir s’il y a plus de risques à l'arrêter net, dès maintenant, que de la laisser devenir un fait accompli....