PRÉCÉDENT

La France, 29 janvier 1897

SUIVANT

URL invalide

La France
29 janvier 1897


Extrait du journal

rantissons... Mais comment vous la faut-il ?... Grosse ou petite?... Nous tenons les deux, au choix 1... Trop grosse, ça fait crier... trop petite, ça fait sourire !... C’est à vous de fixer votre chiffre, votre moyenne... Voilà pourquoi je vous dis : Donnez-moi le contingent ! — Le secrétaire général commen çait à comprendre. L’autre continua : — Tous les maires du département viendront vous adresser la même de mande. Ils sont stylés à ça... S’ils ne viennent pas, convoquez-les... Et quand vous serez convenu d’un chiffre avec eux, soyez tranquille, vous aurez la majorité qu’il vous faudra!... Ça les regarde !... On n’a pas la sous-ven trière pour trahir ceux qui nous l’ont donnée ! C’est gentil, n’est-pas? Ce n’est pas tout. Il y a dans ce môme département un moire inamovible. C’est le seul de son bourg qui soit à la hauteur des fonc tions municipales. Aussi, de même que l’amour est de toutes les saisons, il est, lui, do tous les régimes. Il les sert tous, du reste, avec le même zèle, le même dévouement et la même im partialité. Le jour d’élection, le bonhomme s’assied sur son seuil,vêtu d’une redin gote flanquée de deux vastes poches. Il ne l’endosse qu’à celte occasion, il l’appelle son urne. Et c’est son urne, en effet. Les électeurs — ils sont en petit nom bre, rouges ou blancs, il n’y a pas de milieu — défilent devant lui. Il les in terpelle successivement : — Toi, tu votes rouge... mets ton bulletin blanc dans ma poche gauche... Toi, tu votes blanc, mets-le dans la poche droite. En quelques minutes, la farce est jouée. Puis, le maire entre dans sa ferme, fait le recensement des bulletins, les sépare en deux petits tas et sa femme, ouvrant la porte toute grande,introduit les électeurs qui, suivant la coutume immémoriale, attendaient nu dehors : — Mes enfants, leur dit le maire, je viens de dépouiller le scrutin... il ne reste plus qu'à en vérifier l’exactitude... Vous, les blancs, mettez-vous d’un côté ; vous, les rouges, de l’autre... Bien... Mettez-vous en ligne... Je vais vous compter... Un,deux, trois, quatre, cinq... vingt-deux rouges !... Un,deux, trois, quatre, cinq...dix-neuf blancs !... Voyons maintenant, si je retrouve, dans chaque tas, un nombre égal de bulletins... Un, deux, trois, quatre, cinq... dix-neuf blancs!... Un, deux, trois, quatre, cinq... vingt-deux rou ges !... Le compte y est bien, n’est-cc pas?... C’est M. X... qui l’emporte!... Merci, mes enfants !... Et à une autre fois ! Et, l’outre fois, c’est la même chose. Notez bien que le scrutateur le plus méticuleux n’aurait rien à redire à ce vote. Mais le procédé n’en est pas moins un peu bien patriarcal. Et auprès de la Corse, ce sont là jeux d’enfants. Demandez plutôt à Em manuel Arène. Il est à souhaiter que le temps, l’in struction et l’exercice patient de la liberté fassent tomber en désuétude ces pratiques d’ancien régime, dont c’est l’honneur de notre Paris de s’ètrc de puis longtemps affranchi. Emile Blavet....

À propos

Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.

En savoir plus
Données de classification
  • crozier
  • mollard
  • brisson
  • averland
  • gaston péris
  • hanotaux
  • siegfried
  • méline
  • martin
  • chatillon
  • paris
  • russie
  • france
  • rome
  • afrique
  • soudan
  • venise
  • vienne
  • erythrée
  • berlin
  • union postale
  • sénat
  • agos
  • conseil de cabinet
  • crédit foncier
  • suez
  • sun
  • alliance française
  • sorbonne
  • cher