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La France, 29 juin 1892

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La France
29 juin 1892


Extrait du journal

LES ANARCHISTES Le ratage de Londre». — La presse et la police. — Ce qu'en pense M. Andrieux. On n’a plus, paraît-il, aucun doute sur le résultat du voyage entrepris par l’otficier de paix Fédée et l’inspecteur de la sûreté Mouil ler, afin de « ramasser » à Londres, dans un vaste coup de filet, les auteurs de l’explosion du restaurant Véry. Le coup de filet a été donné dans le vide et les compagnons anar chistes, avertis à temps, se sont prudemment mis à l’abri, momentanément, espérons-le, des investigations policières. Un coup manqué Ce déplorable ratage est dû à certaines in discrétions commises par les journaux « trop informés ». C’est à un de nos confrères qu’il faut attribuer la paternité de la note qui mit en éveil Francis, Meunier et consorts. Pareil fait s’était déjà produit lors de l’af faire Geomay. Si l’arrestation du caporal as sassin avait tardé de vingt minutes, il passait la frontière belge et devenait difficilement re trouvable. Une note d’un journal du matin, qu’il avait du reste dans sa poche, l’avait averti que sa piste était connue et suivie. On est, affirme-t-on, très irrité à la préfec ture de police contre les indiscrets qui ont in volontairement causé le « buisson creux » des agents envoyés à Londres. On paraît disposé à envelopper toute la presse dans des mesu res de rigueur qui, si elles étaient prises, au raient précisément pour effet d’aiguiser encore plus la curiosité des reporters et de priver la police de cet aide précieux qui s’appelle le « communiqué aux journaux ». Nous avons été demander ce matin à M. Andrieux ce qu’il pensait de l’échec d’une combinaison un peu bruyamment annoncée et des rapports qui doivent exister eutre la presse et la préfecture de police. Chez M. Andrieux C’est toujours un bon moment que celui qu’on passe avec l’ancien préfet de police, et j’ai dit plus d’une fois ici-même, avec quelle originalité et quel scepticisme redoutable, il jugeait les hommes et les choses. — Je vois bien, nous dit M. Andrieux, ce qui a dû se passer à propos de l’arrestation de Francis ; mais il y a là-dedans certains côtés obscurs dont le sens m’échappe. Tout, dans cette affaire des anarchistes, a été nmué maladroitement; l’arrestation même de Ravachol a été un pur effet du hasard, et je vous ai dit à cette époque, quelles mesures on eût dû prendre. Vous pouvez vous rendre compte aujourd’hui des résultats qu’on aurait obte nus. Mais, admettons qu’au début les services étaient désorganisés et qu’on a manqué, dès les premiers jours, de moyens suffisants en hom mes et en argent. Il ne doit plus en être de même aujourd’hui, et je m'explique mal cet échec de Londres. Je ne puis croire qu’un juge d’instruction n'ait pu, dans une affaire aussi importante, résister au vain plaisir d’an noncer bruyamment l’arrestation des auteurs de l'attentat contre la maison Véry, avant de tenir les coupables. L’homme qui vend la peau de l’ours avant de l'avoir tué, n’est qu’un simple traqueur de bêtes fauves, et il nous paraît bien naïf ; la chasse aux anarchistes exige plus d'habileté et moins de confiance. Le rôle de la presse M. Andrieux continue : — Quant au rôle de la presse dans cette affaire, il est très clair. Tout journaliste use de son droit en faisant profiter ses lecteurs des informations qu’il a pu recueillir. C'est à la préfecture à se tenir sur ses gardes et à n’employer que des gens absolument sûrs et d’une discrétion éprouvée. S’eu prendre aux journalistes et les tenir à distance ne servirait à rien. Il se trouve rait toujours quelqu’un pour renseigner cer tains journaux... aux dépens des autres et ce serait un joli scandale. Non, tout au contraire. Entre les mains d'a gents habiles, la presse peut devenir un ex cellent auxiliaire, june force redoutable. Seu lement, il faut savoir la faire parler à propos et la faire taire de même. Tout le secret est là et ce n’est pourtant pas, je vous l’assure, une tâche bien difficile. En ce moment, il est inutile de récriminer sur ce qui s’est passé et de montrer une mau vaise humeur qui serait un aveu. Il faut pro fiter de la leçon. Espérons qu'elle suffira. — D. Bonnaud....

À propos

Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.

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