Extrait du journal

Il y a quelques jours, ayant reçu un appel d’une société qui s’intéressait aux orphelins de la guerre, le commandant le communiqua à ses hommes. De leur propre mouvement, Annamites, Cambodgiens, Tonkinois s’apitoyèrent sur le sort des petits français qui ont perdu leur père à la guerre ; de moeurs douces et paisibles, animés d’un espiit de famille très grand, et désireux aussi de donner à la France une preuve de loya lisme, le millier d’indigènes qui forme 1 unité réunit la somme de 936 fr. 33 et la remit au commandant. Inutile de vous dire que la chose me fut contée par lui avec fierté et aussi une pointe d’émotion bien naturelle. Dans ce détail touchant, comme dans le conccurs héroïque et dévoué des troupes coloniales au cours de cette guerre, il convient de recon naître un effet du génie bienfaisant de la France qui traite avec bonté et justice les peuples sou mis à son empire ; il faut aussi y voir un légi time hommage à nos officiers coloniaux qui pra tiquent leur autorité en se faisant aimer. En pré levant cette forte somme sur une solde modeste, ces soldats d’une autre race qu’une nouvelle loi vient d’enrôler sous nos drapeaux et qui demain seront appelés à verser leur sang pour notre pa trie, nous donnent un magnifique témoignage d’affection et de fidélité. Je pourrais vous parler longtemps d’eux, de leur propreté, de l’ingéniosité qui leur a fait trouver de l’eau sur cette terre desséchée, des jardins qu’ils cultivent. Mais ma lettre est déjà longue, et avant de la terminer, je désire vous parler d un incident plutôt curieux qui vous ren seignera sur les ruses employées par les Macé doniens pour faire passer de la contrebande aux germano-bulgares. Tous les moyens leur sont bons. Depuis quelques jours, nous assistions à un exode important de troupeaux de moutons con duits par des nomades qui habitent la partie montagneuse de la Macédoine du nord. Les bergers albanais, grecs, tziganes eu va laques, expliquaient de 1 air le plus naturel du monde...