Extrait du journal

D’UN JEUDI (5 A L’AUTRE g) Le Communiqué français du matin dit que la bataille a pris, de la région de Namur à celle de Se dan, le caractère d’une guerre de mouvement avec participation, de part et d’autre, des éléments motorisés et de l’aviation. Celui du soir annonce que la bataille continue avec la même ardeur et des engagements très vifs en certains points. Dans le secteur de Sedan, où l’ennemi a pu constituer un saillant d’une profondeur moyenne de sept à huit kilomètres, de violentes attaques ont été lancées hier contre nos troupes. Partout nos adversaires ont été contenus, et en fin d’après-midi, des contre-attaques heureu ses ont permis de progresser en plusieurs points le long de la Meuse. Notre aviation de bombardement a attaqué vigoureusement des colonnes ennemies d engins blindés. En résumé, sur tout le front français, nous te nons solidement toutes nos positions fortifiées et l’éperon de Montmédy à Sedan. L’artillerie allemande a pilonné sans succès plu sieurs gros forts de la ligne Maginot, dans les Vosges. La nôtre a anéanti des dépôts de matériel en nemi de l’autre côté du Rhin. Arras a été bombardée dans la nuit et plusieurs maisons détruites. En Norvège, les contingents français et cana diens ont fait reculer les Allemands devant Narvik, de nouveau bombardée par les Alliés. Le Roi Léopold III de Belgique a adressé aux défenseurs des forts de Liège une proclamation disant son admiration pour leur vaillante défense. Les méthodes allemandes n’ont pas changé : cinq ambulances américaines du Nord-Est ont été bombardées par l’artillerie allemande dirigée par avions ; deux ont été détruites. Un bombardier allemand a été abattu par la D. C. A. suisse. La Chambre des Députés a tenu une séance au cours do laquelle elle a entendu une allocution de M. Paul Reynaud, relative à l’attaque allemande contre la Belgique, la Hollande et le Luxem bourg, puis sur la ruée ennemie sur la France. M. Reynaud a dit : « Sur la charnière de notre front, l’armée aile' mande a déchaîné toutes ses forces de destruc tien. Les voici tous, ces chars d’assaut et tous ces avions accumulés avec méthode pendant tant d’années, grâce aux privations sans nom du peu pie allemand, et avec l’idée fixe de son chef : la guerre pour abattre la France et dominer 1 Euro pe, puis le monde. . « Hitler veut gagner la guerre en deux mois, s il échoue il est condamné, et il le sait. C est pourquoi, après avoir longtemps hésité, après avoir affirmé qu’il laisserait pourrir cette guerre, il a pris son risque. . . . « Nous avons une parfaite connaissance du péril Nous savons que les jours, les semaines, les. mois qui viennent, vont forger des siècles d’avenir. Ce péril, nous l’abordons unis. » _ Il a terminé ainsi : « Nous sommes pleins d’es poir ; nos vies ne comptent pour rien. Une seule chose compte : maintenir la France. » Les députés, debout, ont applaudi ces paroles, de même que celles de M. Herriot, président de la Chambre, lequel a associé le Parlement à 1 hom mage rendu aux soldats français et aux alliés. 11 a conclu en ces termes : « La France sent la gran deur et le tragique de cette épreuve. Elle demeu rera égale à son passé et à son destin. » La presse américaine dit que le président Roose velt a envoyé un message à M. Mussolini pour le prier de « rester en paix ». L'Officiel a publié un décret allouant aux fa milles des militaires décédés ou disparus un se cours dont le montant est fixé uniformément à 600 francs et 100 francs par enfant de moins de 16 ans.Pour les disparus, le secours ne peut être demandé que six mois après la disparition....