Extrait du journal

Château-Gontier, 25 Septembre 1895. ET LE BUDGET? La Commission du budget a repris, lundi, ses travaux interrompus depuis le 20 juillet. Son président, M. Ed. Lockroy, lui a donné communication d’une lettre par laquelle M. le Prési dent du Conseil, ministre des finances, lui annonce une demande nouvelle de plus de 13 millions de crédits supplé mentaires, et laisse entrevoir que la s;t lation, au 30 septembre, révélera un nouveau déficit. Ce n’est, pas tout. M. Ribot déclare que, pour le budget de 18%, il récla mera un relèvement de crédits. Ce ministre des finances est ingénieux. Sous prétexte de diminuer les crédits supplémentaires. il augmentera les crédits ordinaires. Notez bien que lorsqu’il tiendra ces derniers, il n’hés'tera pas à solliciter un supplément de plusieurs millions. Le truc n’a mêm*3 uas le mérite de la nouveauté. Tous les ministres républicains l’ont em ployé. Lorsqu’il s’agit de boucler le budget, on découvre, au dernier mo ment, des réductions à opérer, et l’on arrive ainsi à un équilibre fictif. Par fois même, l’équilibre, malgré tous les artifices d’une comptabilité provisoire, n’existe même pas sur le papier. Mais comme, en réalité, le gouvernement li a pas supprimé les dépenses, la carte à payer revient sous la forme de cré dits supplémentaires. C’est ainsi que s’est creusé le trou budgétaire et que, pour le combler en partie, le pouvoir a recours à des impôts mal étudiés, dont le principe est injuste, et dont les effets seront nuis, car le blé est mangé en herbe par les voraces gouvernants. Avec les impôts nouveaux, il y aura, dit-on. un emprunt énorme, dont la nouvelle a déterminé une baisse sur les fonds publics. Avions-nous raison de signaler les périls du gaspillage dont, aujourd’hui, les républicains ne peuvent plus nier les conséquences ruineuses pour le pays y Les chiffres du budget donnent d’éclatants démentis aux assurances optimistes des officieux célébrant la prospérité financière du régime dont la gestion coûteuse pèse lourdement sur la France ? Et le budget, quand sera-t-il voté ? M. le Président du Conseil ne serait pas fâché de laisser croire que la Com mission du budget est responsable de retards contraires à toutes les bonnes règles. Mais celle-ci a tenu à constater qu’elle n’était pas encore saisie des propositions définitives du gouverne ment, et a invité celui-ci à lui faire connaître, enfin, dans un bref délai, ces propositions. M. Ribot a accepté la leçon de bonne grâce. Malheureusement, ces leçons méri tées par les ministres, ce sont les contribuables qui les paient, car la chute, qui parait prochaine, de M. Ribot, ne dispensera pas le pays des charges que les ministères successifs ont accumulées avec une imprévoyance obstinée....