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La Libre Parole, 13 mars 1900

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La Libre Parole
13 mars 1900


Extrait du journal

Total 0 fr. 90 Soit par an 328 fr. 50. Ce qui, avec les 208 fr. de dépenses d’autre part, porte le budget en dépenses au total de 596 fr. 50. Four vivre une année dans ces con ditions, la chemisière dont le salaire est de 2 fr. par jour, en moyenne, devra travailler 300 jours, pas un de moins. Si elle tombe malade, si elle a trop de chômage, que voulez-vous qu’elle fasse ? Descendre au trottoir, si elle est en core jeune et gentille; mourir d’inani tion si elle est vieille ou trop laide... On me dira que toutes les ouvrières parisiennes ne gagnent pas 2 francs par jour. Il y en a, en effet, qui gagnent da vantage, mais il y en a également dont le salaire est encore moins élevé. H y en a des milliers qui gagnent 25 sous ; il existe des créatures humai nes, des créatures de Dieu qui sont obligées de se suffire, de payer un loyer, de se vêtir, de se blanchir, de manger et de travailler, le tout avec 18 sous par jour ! Celles-là sont les damnées de l’enfer parisien, mais croyez-vous que leurs sœurs un peu moins malheureuses, en apparence, croyez-vous que les ou vrières qui reçoivent 3 fr. 50 ou h fr. par jour pour onze heures de travail au minimum puissent maintenir leur frêle budget en équilibre, avec les chômages qui arrivent régulièrement et qui les jettent sur le pavé deux fois par an ? Imaginez ce qui doit se passer dans ces jeunes cerveaux, les réflexions, les désirs, les envies qui doivent traver ser ces têtes presque toujours gra cieuses, sinon jolies, lorsque l’essaim des ouvrières descend de l’atelier dans ce Faris du soir étincelant de lumières et flamboyant de luxe, pour remonter vers les lointains, vers les sombres faubourgs. Parmi cette jeunesse gaie et rieuse malgré sa misère, il y a de belles Filles de vingt ans qui ont servi dans la journée de mannequins; on leur a mis sur le dos des robes de cent louis des tinées peut-être à quelque vieille rô tisseuse de balai dont l’équipage a fait sensation dans la rue. Pourquoi voulez-vous que la Parisienne, qui a appris à l’école qu’il n’y avait ni Dieu ni Diable et qu’après la mort on al lait pourrir dans la terre, ne se dise pas, au bout de quelque temps : — Après tout, moi aussi, je suis belle. Je suis plus jeune et plus jolie que cette vieille grue. Il n’y a donc aucune raison pour que je n’aie pas à mon tour ma voiture et de belles robes tant que j’en voudrai... Celle-là est fatalement vouée à la haute noce; si elle a un peu de chance, si elle réalise son rêve, elle sera la chair à plaisir haut cotée, la grande poupée de luxe du Paris qui fait la fête. Les échos des journaux du boulevard détailleront ses toilettes avec des épithètes incandescentes qui coûteront à ses entreteneurs presque aussi cher que ses diamants. Les Bérenger et les sous-Bérenger, les moralisateurs en Chambre diront d’elle avec mépris : « C’est une pros tituée ! » Prostituée, si Von veut; mais au $Ue vit, elle est habillée, logée,...

À propos

Fondée par le polémiste Édouard Drumont en 1892, La Libre Parole était un journal politique avançant des prétentions « socialistes », quoique son anticapitalisme populiste marqué se nourrissait essentiellement de liens présumés entre le capital et la communauté juive. Le journal répandait un antisémitisme virulent à travers de brutales diatribes et des unes sensationnalistes dénonçant quotidiennement des « conspirations ».

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