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La Petite Gironde, 4 avril 1907

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La Petite Gironde
4 avril 1907


Extrait du journal

naître dans l’esprit de se» citent» les espé rances chimériques dont 11 est parlé au Code pénal pour définir l’escroquerie, il eût fallu le tirer au clair avant de réclamer son extradition. Ce n'est pis tout encore ; on Sirononce contre le financier qu'on se dispose l expulser une interdiction de séjour. On l’expulse après l’avoir egtradé 1... On va le ramener de vive force à l’endroit d'où on l’a fait venir à la force du poignet. Mary Raynaud serait fondé à apostropher en ces termes les organe» de la justice : •— Messieurs et chers organes, vous me scmblcz atrophiés.Comment ! j’étais allé,com me Thémistoclc, m’asseoir au foyer du peu ple britannique. Je m’y trouvais fort bien assis ; vous avez mis tout en œuvre pour m’en arracher ; vous m'avez gardé pendant près d'une année sur la carpette humide d'un cachot, pour finir par reconnaître que je ne saurais être mis en jugement I F.n me rendant ma liberté, vous me privez de ma patrie bien aimée, dont j’ai eu l’honneur, fugitif il est vrai, de représenter un arron dissement dans le temple où se font les lois que vous appliquez avec tant d’ineohércnce P Puisque vous n’avez pas trouvé le moyen de me juger, c’est moi qui vous juge, et je vous juge sévèrement. Ce que vous faites là est empreint d’une gluante ineptie. Quand un Français est tranquillement assis au foyer du peuple britannique et qu'on a fait des pieds et des mains pour l’en extirper, il est profondément absurde de le contraindre à y retourner I Vous semble» avoir oublié que l’exil est impie. Rcndez-moi ma patrie 1 Laissez-moi vivre libre dans mon pays libre, et berner en paix mes concitoyens I Il est infiniment probable que si Mary Raynaud avait pu faire sa rentrée dans le monde des affaires véreuses, il y aurait été reçu à bras ouverts par les dupes ravies, auxquelles il eût promis cette fols non plus trente ou quarante pour cent, mais au bas mot mille pour cent, A ♦itre de compensa tion pour les mécomptes d'un importun passé. Et il eût fondé, au milieu de leurs accla mations enthousiastes, une quatrième ban que des Etats, des Nations ou des Halluci nations. Ce dernier nom eût été de beaucoup le meilleur. Mary Raynaud spécula, en effet, sur cette forme particulière de la poésie qui consiste à confondre, en matière financière, le rêve avec la réalité. Promettre quarante pour cent d’intérêts, A une époque où l’ar gent en produit si péniblement trois, c’est faire œuvre de psychologue averti. Mary Raynaud aurait été en mesure de lancer avec succès une Société immobilière des Châteaux eu Espagne, le seul pays du monde où l’on puisse bâtir des châteaux sans matériaux d'aucune sorte. Toujours est-il que l’incohérence de la procédure dans l’affaire Mary Raynaud ajoutera fort peu à l’éclat et à la majesté de la justice. Ceci me remet en mémoire un mot pro noncé par M. le président Morve dans une affaire d’automobilisme : « Si l’on ne jugeait que quand on est sûr de ne pas se tromper, il faudrait supprimer la justice humaine. »» Cette parole est juste, mais elle n’est pas consolante. Il serait imprudent de la faire graver en lettre» d’or dans les prétoires. Albert ROBERT....

À propos

Au début simple déclinaison à prix modique du journal La Gironde, La Petite Gironde devient de plus en plus autonome à la fin des années 1880, lorsque sa diffusion dépasse – et de très loin – celle de son vaisseau-mère pour atteindre les 200 000 exemplaires à l'orée de 1914. Centriste modérée à l'origine, sa ligne éditorialse se droitise au fil des ans, jusqu'à devenir proche de celle de L'Action française dans l'agitation de la Première Guerre mondiale. Sans surprise, le journal sera collaborationniste en 1940, puis interdit en août 1944.

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