Extrait du journal

tions, ces résolutions mûrement réflé chies s’évanouissaient tout à coup. Celte soirée, dont elle se faisait d’avance une fête, voici qu'elle était gâtée par celte odieuse politique qui lui prenait son mari. Elle dina dans un état d’énervement réel, et aussitôt s’installa dans sa cham bre. Puisqu'il n’était pas rentré, elle l'attendrait en pensant à lui. Elle avait entrepris une grande tapis serie, copie d’une chasse de l’époque Renaissance, qu’elle destinait à son salon. C’était un travail fort délicat; elle s’y absorba, prise d’une rage fébrile. Penchée sur son métier, elle alignait les points en véritable Pénélope, mariant les nuances, les tonalités délicates avec goût, s’efforçant do chasser les idées mauvaises, de ne songer qu’au bonheur de revoir M. Delannoy... Tout à l’heure il rentrerait : il serait là auprès d’elle. Comme elle l’embrasse rait! comme elle le couvrirait de baisers passionnés! Jamais elle n’avait éprouvé une telle fringale d’amour. Dans une crise violente de sentimentalité elle se reportait aux jours plus heureux du commencement de leur mariage, quand il so montrait si empressé, si tendre. Elle sc reprochait sa froideur à son égard, s’en voulait de n’avoir pas su vaincre sa maudite timidité. Au fond, ce n’était pas un mauvais homme, et, s’il la négligeait depuis quelque temps, n’était-ce pas aussi un peu sa faute, n’avait-elle pas sa part «le responsabilité du changement qui s’était opéré en lui ? Et puis, ne 5e trouvait-il pas en passe de devenir célèbre? C’est qu’il était un travailleur, très aimé de « son groupe »; il irait loin, ministre peut-être, qui sait?.....